La terre
Envolez-moi au-dessus des chandelles noires de la terre,
Au-dessus des cornes venimeuses de la terre.
Il n’y a de paix qu’au-dessus des serpents de la terre,
La terre est une grande bouche souillée,
Ses hoquets, ses rires à gorge déployée,
Sa toux, son haleine, ses ronflements quand elle dort
Me triturent l’âme. Attirez-moi dehors !
Secouez-moi ! empoignez-moi, et toi terre chasse-moi.
Surnaturel, je me cramponne à ton drapeau de soie
Que le grand vent me coule dans tes plis qui ondoient.
Je craque de discordes militaires avec moi-même,
Je me suis comme une poulie, une voiture de dilemmes
Et je ne pourrai dormir que dans vos évidences.
Je vous envie, phénix, faisans dorés, condors…
Donnez-moi une couverture volante qui me porte
Au-dessus du tonnerre ; dehors au cristal de vos portes.
Max Jacob, in Sacrifice impérial