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Chroniques de l’ordinaire bordelais – Episode 67

Publié le 22 septembre 2013 par Antropologia

L’école de la vie,  dit-on !

C’est l’heure… Les trois compères de travail se sont donné rendez vous devant le massif lycée de briques rose et pierres de taille. Chacun est venu avec sa chacune, sa copine ou… sa mère. Heureux de se retrouver même pour cette ultime sanction. Regards pétillants et fébriles…Ils ont tant travaillé ensemble pour cela.

Ils rentrent… Sans réel intérêt de l’extérieur, la bâtisse est plus élégante à l’intérieur avec sa cour d’honneur bordée d’une galerie à arcades. La cérémonie est prévue dans la cour d’honneur où les membres du jury sont déjà installés. Sagement les gens pénètrent dans l’enclos et se placent autour du jury. Les graviers crissent sous les pas, les roses des buissons égaient l’ambiance qui s’alourdit au fur et à mesure que le silence s’installe.

Ils attendent les derniers retardataires… le président du jury… introduit cette nouvelle cuvée d’agrégés de lettres modernes… Une très bonne cuvée… des notes très exceptionnelles… et commence à déclamer les noms…

Drôle de scène de sentir la tension monter, les visages se crisper ou se détendre. Les uns s’exclamer ou pleurer de joie, les autres serrer la mâchoire au fil des noms et finir pour certains à lâcher un râle ou un sanglot.

Jeanne, le visage tendu vers le jury, garde un semblant de calme… son cœur prêt à s’arrêter… attend…  elle réussit à sourire et se retourner à l’annonce du nom de sa commère, jeter un œil furtif sur l’autre compère qui le lui rend avec un maigre sourire… et la litanie s’étire… dure… Jeanne… mais pas la bonne… Samuel… mais pas le bon. Une éternité !!!!

Marie Rose si heureuse à l’annonce de son nom… reste toujours aussi tendue, attendant la suite… pour se réjouir vraiment. Quel drôle de mélange dans l’air… qui devient aussi plombé pour les uns qu’il est léger pour les autres. D’autant plus léger qu’il s’accompagne de l’annonce de ses merveilleuses moyennes obtenues par le peloton de tête… Vraiment une magnifique promo… reconfirme le président. Cinglant coup de grâce pour les perdants !!

Mais là, même les joyeux n’osent plus l’être vraiment à côté de ceux qui baissent maintenant la tête tachant de déglutir pour faire passer la boule au fond de leur gorge.

L’audience se disloque avec peine… La vie reprend ses droits. Deux ou trois recalés balayent l’affaire d’un geste de la main : « passons à autre chose ! », Samuel sourit et pense déjà à se réinscrire l’année prochaine pour ne pas perdre la main… Déjà il embarque Jeanne dans son bateau… « Et cela, année après année avant de le retenter par la voie interne s’il le faut, Jeanne !! » Jeanne ne dit rien, ou pas grand-chose. Elle se réjouit de la nomination de ses deux copines et surtout de sa commère aux larmes et sourire mêlés… Qu’y a-t-il à dire de plus ? Règne entre eux une grande pudeur. Comme les sportifs chacun sait qu’il aurait pu être de l’autre bord… Tous de sacrés bons joueurs !!

Samuel sort son portable et sonne le deuxième round : le moment… d’annoncer aux autres…

Cette célébration appelée proclamation… vieux rituel de passage perdure… C’est un étrange supplice car les noms des 117 admis sont égrenés du dernier au premier… devant les 250 admissibles… Au collège, un tel système est un vrai bonheur : celui qui entend le nom des autres…  sait qu’il aura mieux car tous seront cités mais là, aujourd’hui pour les 133 absents de la litanie une drôle leçon de vie !

Virginie Perchais



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