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27 septembre 2011 | Alexandre Hollan, Carnets

Publié le 26 septembre 2013 par Angèle Paoli
Éphéméride culturelle à rebours

CARNETS, ÉTÉ 2011

27.9

En regardant mes dessins de l’été j’ai vu clairement qu’une vibration s’imposait de plus en plus. Elle devenait une présence vibrante, mouvement de la matière du papier, et immobile, qui déchire les traits, qui les fait vibrer.
La surface, quand elle vibre, crée un contact avec un autre aspect de l’arbre.

Depuis longtemps je cherche à « être dans l’arbre », ne pas me promener sur sa surface, pas seulement trouver une direction, une force traversant sa masse, et disparaissant, ou changeant.
La vibration apparaissait comme un mouvement à l’intérieur des traits, qui pouvait les « rendre vivants » — une tension — relâchement inimitable. (Je me l’expliquais en disant le trait tourne, avance en spirale, ce que je pense encore, comme un tire-bouchon qui pénètre une matière plus dense.)
(Mais) en regardant les traits qui circulent dans mes dessins, et dans lesquels je poursuis une force présente au moment même, je devine « la matière » d’un regard naissant, d’une sensation – et c’est cette sensation qui vibre et qui anime le papier.

Il y a des traits fins, légers, rapides, qui volent presque, sans laisser de contact. Une sensation plus lourde, plus dense, s’exprime par un trait plus affirmé, plus lent, plus visible.

La vibration (est un) mouvement de la profondeur.

La vibration est matérielle. Une vieille pomme vibre, un sac tissé vibre. La lumière vibre entre les feuilles d’un arbre.
La vibration d’une peinture se concentre ou se dilate sur la surface travaillée. Les contrastes, le déséquilibre, suscitent la vie. La vibration cherche à rééquilibrer, atténuer les contrastes, en alternant les concentrations, en comblant les vides. Mais elle garde sa forme de vibration (par exemple une trame d’impression d’un journal ne peut reproduire une plus grande finesse que sa propre trame).

Résonner, reproduire une vibration, la prolonger : vibrer.

Se souvenir, retrouver une vibration dans la mémoire.

Si je considère la vibration comme un mouvement, elle ne correspond pas à l’idée que je me fais du mouvement. Pour vibrer en me dépassant, pour vivre “ma propre vie” à l’intérieur d’un lieu vibratoire, je dois connaître ses dimensions, ses limites, et savoir jusqu’où je peux aller.

Le langage des vibrations est concentration vide : point vide. Ajouter un *.

Alexandre Hollan, Carnets, été 2011 in L’Atelier Contemporain, 1er numéro, été 2013, pp. 166-167.

L'Atelier contemporain, premier numéro , été 2013




■ Voir | écouter aussi ▼

Quelques « bonnes feuilles » du premier numéro de L’Atelier contemporain [PDF]
→ (sur le site de France Culture) Alexandre Hollan dans l'émission Hors-champs (Laure Adler) du 19 juillet 2013




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