Ce silence est le meurtre désintéressé de mes mots, l'exé...

Ce silence est le meurtre désintéressé de mes mots, l'exécution programmée de ce discours dont je n'ai pas su trouver la formulation exacte. Avant de t'entendre je n'avais plus vécu, jusqu'à l'ignorance oublieuse, cette sensation de manque et d'effroi qui voudrait murmurer : pourquoi t'es pas là pour me tenir la main. J'ai préféré me taire, d'abord comme un défi envers moi même, ensuite parce que de toute façon, tu ne serais pas rentré. Ce silence est une évocation de ma détermination puérile à ne pas céder. Je me fais des idées, tu sais. J'ai des mondes entiers dans le renfoncement des joues, des armées sur les clavicules, et tellement d'histoires dans les yeux que je ne vois plus rien. La courtoisie de circonstance me glisse le long des intestins comme un pavé de glace, et j'aimerais manger cette voix pour qu'elle tapisse mon corps de l'assurance naïve de ces êtres bicéphales que je n'arrête pas de croiser. Ce silence est le repli gêné de l'hiver sous le pull témoin de mes comptines faciles. S'il te plaît, veux-tu incarner pour moi cette nouvelle chance de me vautrer dans l'humanité brûlante.