Après 7 ans en Inde, j'ai évidemment écrit un peu sur le sujet (voir ci-dessous). J'ai parfois été révoltée contre ce système. Je l’ai aussi accepté. Ignoré. Oublié.
Ce n’est pas tellement le système en lui-même qui dérange – soyons réalistes, chaque société est divisée en classes sociales – mais sa rigidité... Une caste (dans laquelle un Hindou né) définit sa profession, son régime alimentaire, sa femme etc.
Je n’ai jamais vraiment cherché d’où ce système venait...
Selon les anciens livres hindous, la société humaine aurait été créée à partir d'un corps : les Brahmanes seraient issus de la tête, les Kshatriyas de la main, la Vaishias des cuisses et les Sudras des pieds. Dans certaines versions, le corps d'origine serait celui d'un géant primitif, Purusha, sacrifié par les dieux pour créer la société humaine ; dans d'autres celui de Brahma.
Toute chose, animées et inanimée, est censée posséder trois qualités, dans des proportions différentes : Sattva, Rajas et Tamas. Les Brahmanes posséderaient les Sattvas (qui comprennent sagesse, intelligence, honnêteté, bonté et autres qualités positives) ; les Kshatriyas et Vaishias les Rajas (passion, fierté, bravoure et autres qualités passionnées) ; les Sudras avec les Tamas (insipidité, bêtise, manque de créativité et autres qualités négatives). Et des qualités que chacun possède découle sa profession. Et son régime alimentaire, adapté au développement de ses qualités intrinsèques. Par exemple la viande est considérée comme un aliment tamasique mais aussi rajasique.
Il me semble probable que ces deux explications ont été développées pour intégrer un système hérité d’une situation socio-historique. Ce qui nous ramène quelque part vers 2000 ans avant JC lorsque la civilisation harappéenne de la vallée de l'Indus commence à décliner et qu’un groupe de guerriers nomades, les Aryens (peuple d’Asie centrale qui parlaient l’Indo-européen), commence à émigrer. Les scientifiques ne sont pas d’accord et donc on ne sait pas si les Aryens et les Harappéens auraient cohabités et se seraient mélangés de manière paisible, ou si les Aryens auraient débarqués en conquérants et seraient devenus la classe dirigeante et auraient mis en place le système des castes pour garder le contrôle.
Toutefois et c'est mon observation personnelle, la stratification de la société en Inde est clairement liée à la couleur de la peau. Plus t’es blancet plus ta caste est élevée, plus t’es intelligent, plus t’es riche, plus t’es beau. Ou en tout cas tu es perçu comme tel.
Et tout ceci ne date pas d’hier. Ni même de la colonisation britannique. Y a qu’à voir comment un bébé regarde un blanc. Et j'ai rencontré très peu d'Indiens qui n'ont pas, quelque part au fond, un complexe d'infériorité – totalement injustifié et difficile à comprendre pour moi – envers un Blanc. Il suffit de les anciens écrits religieux hindous blindés de « guerres entre les bons (et blancs) Aryens et les noirs démons ».
Quoi qu’il en soit, il semble que l'organisation des Aryens en trois groupes (les Rajayana devenus les Kshatrias (guerriers), les brahmanes (prêtres) et les Vaisias (agriculteurs et artisans), plutôt logique et facile à adopter, ait été intégrée par les populations indigènes. Plus tard, « les communautés qui occupaient des emplois « non polluants » ont été intégrées aux Sudras et les communautés qui avaient des professions « polluantes » sont devenues des parias ou hors-castes ».
Ce système était pratique pour les dirigeants – comme il le serait dans n’importe quelle société. Les règles étaient strictes et suivies à la lettre. La religion (l'Hindouisme étant principalement un ensemble de superstitions) a également été utilisée pour maintenir le peuple « sur la bonne voie », dans la crainte de représailles. Et ce qui différencie les Indiens c’est que ce n’est tout simplement pas dans leur nature de se rebeller contre l'ordre établi. Ca arrive parfois – c’est ainsi que l'intouchable Ambedkar a encouragé les Hindous à se convertir au bouddhisme en réaction au système de distribution et que ces conversions d’intouchables arrivent encore de nos jours, par exemple pour le 50ème anniversaire de la mort du dirigeant* – mais fondamentalement la société reste la même...
Le système de castes est-il toujours présent et visible dans les villes ?
« Soit ça ne l’est pas dans mon univers (personnel et professionnel) soit c’est trop subtil pour moi – en même temps je ne cherche pas trop à approfondir. »
Anecdote du gros Indien imbu de sa supériorité qui donna une leçon à un serveur :
24/04/2013
Les Indiens se rebellent-il contre ce système ?
« Dans les campagnes, le système de caste est très présent.
Lisez l'histoire de Sampat Pal, une bergère qui, avec son gang des Saris Roses, s’est rebellée contre les injustices infligées aux castes inférieures par les castes supérieures ou aux femmes par les hommes, contre la corruption et le détournement de denrées, de terrains, de jobs que le gouvernement réserve aux plus pauvres. »
20/04/2013
Le problème des castes et des quotas dans la société actuelle
« La Constitution indienne interdit toute discrimination liée à la caste.
Ceci-dit il n’appartient pas au gouvernement d’abolir un tel système vu que c’est lié à la religion.
D’ailleurs, le dernier recensement (2011) incluait une question (optionnelle) liée à la caste.
Le castéisme est un pilier de l’hindouisme : « l’accomplissement de son devoir personnel de caste – et non d’un devoir universel – et le système de réincarnation dans une caste plus ou moins élevée en récompense de vos actions bonnes et mauvaises constituent les deux piliers fondamentaux de cette religion en attendant la délivrance finale et le paradis. »).
Pour lutter contre cette discrimination, l’Etat a mis en place des quotas d’accès à l’éducation, aux jobs de fonctionnaires, aux sièges politiques. Il y a même eu un président intouchable (K. R. Narayanan).
Le problème c’est qu’aujourd’hui tout est chamboulé et au final ces quotas favorisent des gens à cause de leur statut social (caste) mais pas de leur mérite ni de leur revenus. Et comme ils forment une majorité**, les politiciens ont du mal à changer ce système… »
http://www.indiansamourai.com/archive/2013/04/18/serie-sur-les-castes-et-les-inegalites-en-inde-les-grandes-l.html
22/04/2013
Qu'en est-il des castes inférieures et des hors-castes ? Et comment les occidentaux perçoivent-ils ce système ?
En Inde les gens n’hésitent pas à qualifier l’un de leurs compatriotes d’« inculte » (non-educated). Un terme un peu choquant pour un Français. Comme le qualificatif « arriéré » (backward) pour désigner la catégorie de personnes des castes inférieures.
« D’après le dernier recensement (source : http://www.censusindia.gov.in/2011census) les « intouchables » et les tribus représentent 30% de la population hindoue / 24% de la population indienne. Et si on ajoute les « pieds » (les « kshudras » ou basses castes) ça nous donne 54% de la population. »
http://www.indiansamourai.com/archive/2011/04/14/c-est-quoi-ton-petit-nom-mon-frere.html#more
05/04/2011
Marc Boulet (qui a appris l’Hindi courant, pris des pilules pour avoir la peau bronzé et vécu dans la rue comme un mendiant intouchable et écrit un livre Dans la peau d'un Intouchable) :
« 83% des Indiens sont hindous et divisés en 2000 à 3000 castes, groupes héréditaires, ségrégatifs et endogames, souvent liés à une profession et hiérarchisés entre eux selon leur degré de pureté hygiénique et religieuse.
Les intouchables sont environ 130 millions, soit 15% de la population indienne, auxquels il faut ajouter 65 millions d’authentiques aborigènes vivant dans la jungle et également considérés comme intouchables à cause de leurs coutumes tribales, donc primitives et impures. Grosso modo, un Indien sur quatre est intouchable, ce qui représente un homme sur vingt-huit au niveau de la planète.
« Ce n’est ni un peu plus de démocratie, ni une meilleure éthique policière qui résoudront [le problème des droits de l’homme]. L’absence de droits naît du castéisme et donc de l’hindouisme. Un système social d’hommes et de sous-hommes qui empoisonne l’Inde sous couverture de la religion, de Dieu. Les Occidentaux n’y voient que du feu. Ils combattent à juste titre le racisme et l’antisémitisme, mais ils posent un regard indulgent sur le castéisme et considèrent qu’il appartient au patrimoine culturel indien, tel le Tâj Mahal. Le castéisme ne les scandalise pas, c’est lointain et je pense aussi que leur bienveillance naît de l’admiration qu’ils portent à la civilisation brahmanique et du dégoût que leur inspirent les balayeurs et autres intouchables confondus pêle-mêle avec les mendiants et les lépreux pour qui ils n’envisagent qu’une charité dédaigneuse. Ils oublient que les étrangers eux-mêmes sont des intouchables et n’ont rien en commun avec les brahmanes ou les Rajpoutes qui les fascinent tant. […]
Je n’ai plus peur des mots. Le castéisme est un système ségrégationniste, tout comme l’apartheid en Afrique du Sud. Aussi ignoble, aussi condamnable. »
http://www.indiansamourai.com/archive/2008/09/11/du-casteimse-en-inde.html
11/09/2008
http://aDaniel.tripod.com/Origin.htm
http://www.thenagain.info/webchron/India/AryanMig.html