Cette femme-là, elle n’a pas de nom, mais elle a un visage. Et un corps. Un corps de poupée dont le ressort abîmé ne lui permet plus que d’avancer de dix pas en dix pas, sans que personne pourtant ne vienne jamais remonter le mécanisme.
Cette femme-là, elle passe dans la rue à la même heure tous les jours, les bras serrés sur son sac, les jambes oscillantes sur ses talons.
Cette femme-là, elle n’existe pas autrement que dans sa progression ridicule, sans cesse interrompue, sans cesse recommencée. Elle ne parle pas, pas même à soi. Elle est, c’est tout, et quand on passe près d’elle, elle s’immobilise un instant comme si le monde venait soudain la frôler, comme si elle avait oublié que d’autres trajectoires croisaient la sienne. Comme si elle avait peur.
Cette femme-là, elle me déchire le cœur.
Jeu de briques
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