Le pourquoi du comment du nom de ce blog. La minute philosophique du Dimanche. La fascination que je porte à ce mot.
Un article que j’ai écrit il y a un moment. Mais qui résonne toujours vrai au creux comme au sommet de mes vagues. En espérant que vous y trouverez écho.
L’immuable ordre qui nous a été inculqué, dès la tendre enfance, par la société dans laquelle nous n’avons d’autre choix que d’évoluer, peut-il être remis en question ?
Les différentes structures dans lesquelles nous nous bâtissons, qu’elles soient parentales, sociétales, entrepreneuriales, architecturales, mathématiques, ne sont elles pas à la source de la conformité et de l’ordre ?
Qu’en est-il alors de la différence ? De l’envie de désordre et d’excentricité ? Tout simplement de l’identité ?
Parce qu’en pensant structure s’impose inévitablement déstructure. Parce qu’en voyant un ordre quelconque je ne désire que le désordre. Parce qu’être structuré n’est pour moi qu’une énormité. Parce que je ne sais me construire que dans la confusion. Parce qu’ordonner c’est, à mes yeux, détruire l’excentricité…
Je ne blâmerai pas la structure. Parce que sans ordre le désordre n’aurait plus de sens. Il n’existerait pas. Parce que la confusion est la possibilité la plus vraie d’atteindre sa réalité. Parce que les rêves ne sont que les jouets du déséquilibre. Parce que du trouble naît l’inspiration. Parce que sinon la beauté du mot capharnaüm n’aurait plus de sens.
Dès notre apparition au monde, notre structure ne cessera d’être échafaudée. A tout prix, nous serons coulés dans la masse, bétonnés de l’en-dedans. Nous passerons nos vies à instituer nos fondations, à bâtir une carrière (exemplaire), à nous construire à l’image de la réussite, à nous édifier en personnes normales.
La société, comme la justice, voudra que nous soyons carrés et droits. Normés. Nous demandera des décisions tranchées et des rêves conventionnels.
Mais si, un jour, par le plus grands des hasards, apparaissait une malfaçon. Un grain de sable dans le rouage de la normalité. Si, en fait, l’ouvrage était mal conçu. Les fondations mal agencées. Si malencontreusement une brèche persistait à exister. Une ultime infiltration. Si en-nous pouvait s’insinuer une once de déraison. Une différence. Une petite parcelle d’aberration. Une opposition, même minime, à l’agencement rationnel qui nous a été inculqué.
Ne serait-ce pas sublime ?
De remettre en question l’ordonnancement des choix et des possibles. De s’imaginer autre. De s’inventer une vie contradictoire. De se découvrir tout en différence. Hors norme.
Si tout à coup des envies de désordre nous emplissaient. Des désirs de bordel monstrueux. De tout envoyer valdinguer. De tout foutre en l’air. Idées et convictions. Conformité et uniformité. Certitude et vérité unique. De rendre illogique chaque fondement. De façonner le monde à notre façon. De braver les règles et les interdits. De nous chercher enfin. De partir à la recherche de notre identité. D’être soi. Envers et contre tout.
Nous pourrions alors peindre un chef d’œuvre, une œuvre d’art, prenant racine et construction dans le désordre concerté de soi.
Nous pourrions alors représenter un Monde à nos couleurs. Un monde qui ne serait plus irréaliste et imaginaire puisqu’il serait pétri de nos propres mains. Modelé et sculpté d’individualité. Nous pourrions le dessiner comme on le veut, le gribouiller. Et même si on ne peut le gommer, nous pourrions l’arranger. En modifier les courbes et les couleurs, y ajouter du noir, et du rose surtout, en n’oubliant pas que le choix des couleurs est très important. Nous pourrions esquisser un tableau si sublime, un portrait-craché. Nous pourrions éviter d’en faire une toile vide ou ordinaire. Notre vie pourrait être une œuvre d’art où chaque jour nous ajouterions un trait.
Puis avec nos rides et nos cheveux blancs, nous contemplerions cette œuvre, ressemblante à aucune autre, y trouvant enfin structure et logique. Unique.
Parce qu’en déstructurant l’appris, nous aurions réussi à nous construire, à nous structurer autrement. Parce qu’en désordonnant l’ordre instigué nous aurions créé notre propre ordre. Parce qu’il n’est pas de plus bel agencement que celui que nous imaginons de nous.
Nous pouvons faire de nos vies des rêves et des rêves une réalité.
(Article publié dans Consommation Spécifique #2 – Structure)