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Déroutante promenade

Publié le 28 octobre 2013 par Carmenrob

Je rentre chez moi, toute chamboulée. J’étais pourtant sortie marcher sans me méfier. Le circuit habituel. Je quitte l’immeuble par l’avenue Laurier que je remonte jusqu’au jardin Jeanne d’Arc. Je le traverse en m’amusant du décor d’Halloween qui l’égaie depuis le début du mois. Je pique ensuite vers la falaise et je longe la rangée de bancs, observateurs imperturbables des grands arbres et du fleuve. Puis je continue vers l’ouest jusqu’au musée. À partir de là, ça dépend de ma vaillance. Ou je fais le tour du rond des Plaines, ou je rebrousse chemin vers la rue Cartier pour y faire quelques courses avant de rentrer. Banal. Routinier. En principe…

Faut dire que ce matin, dès le petit déjeuner, les choses n’étaient déjà pas normales. Par la fenêtre, on ne voyait pas plus loin que le bout de son nez. Des paquets de duvet tombaient du ciel en rang serré. En bas, les toitures étaient blanches. Je l’avoue, j’étais émue.

En début d’après-midi, le soleil était revenu. Dès que j’ai mis le pied sur le trottoir, j’ai bien senti que quelque chose ne tournait pas rond. Une sorte de folie s’était emparée du temps et mélangeait tous les repères. Ce grand vent doux, cette eau qui pissait des toits, c’était avril. L’hiver n’aurait duré qu’un avant-midi, charmant et éphémère. L’été serait à nouveau à nos portes. Pourtant, un peu plus loin, deux jeunes filles faisaient un bonhomme de neige dans le jardin Jeanne d’Arc et les espaces dégagés du parc ondulaient sous une bonne couche de blanc que perçaient des brins d’herbe, comme un visage mal rasé. L’hiver était là. Cependant, les rosiers, les lilas et les tilleuls étaient encore verts et fringants comme en été. Et sur la neige neuve pleuvait l’or des ormes.

Je marchais en regardant de tous côtés, énervée par trop d’émotions contradictoires. Un enfant, éveillé par inadvertance, trépignait en moi. Il s’excitait à la fois des promesses de glissade, des sauts à pieds joints dans les flaques d’eau printanières, des plongées dans les tas de feuilles craquantes et des baignades dans la rivière. Fou, l’enfant, vous dis-je. Et un peu à l’étroit dans ma vieille cage d’os.

En observant les ormes géants qui bordaient ma route, je me suis demandé si ça leur faisait mal, les poussées de sève après les longs mois de gel? Et j’ai pensé qu’ils étaient bien chanceux de revivre en boucle les quatre saisons tout au long de leur vie.


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