Je me souviens qu’ils riaient tous comme des imbéciles quand il leur avait expliqué. On était pas très nombreux cette fois-ci, moins nombreux que d’habitude en tout cas. Leur réaction était-elle due à un excès de pudeur bourgeoise face à un sujet « honteux », ou une simple réaction d’ado un peu attardé, je n’en sais rien. Il faut reconnaître qu’il avait ménagé son effet, en prenant un ton qu’on lui connaissait peu, et qu’il n’employait que dans les instants solennels ou, plus rarement, quand il se laissait aller à une quelconque réflexion grivoise.
Je me souviens que j’avais ri moi aussi, mais d’eux. Bon, j’étais jeune aussi. Mais je savais de quoi il parlait avec sa voix rauque et son ton plein d’emphase. Son explication m’avait remis en tête ce moment à la fois délicieux et ridicule que j’avais visiblement été la seule à expérimenter dans cette assemblée. Je voyais exactement de quoi il s’agissait. Quand j’y repense aujourd’hui, je ne peux m’empêcher de me dire la même chose qu’à l’époque à propos de cette formule si parlante, bien que je doute encore d’avoir réellement poussé l’expérience si loin.
Je me souviens parfaitement du cadre. Une belle et claire nuit d’été, il faisait chaud. Allongés sur l’herbe, on était là tous les deux. En fait, c’était exactement comme dans tous les films romantico-niais qu’on regardait à cette époque là. Du coup, j’étais persuadée que rien ne pourrait jamais être plus beau que cet instant. Bon, je reconnais que j’étais un peu naïve, mais c’est l’âge qui voulait ça. J’étais persuadée d’avoir atteint ce sentiment d’extase mêlé de paralysie momentanée. J’en rajoutais très largement, mais impossible à l’époque de savoir que je finirai par vivre quelques années plus tard cette « petite mort » dont on m’avait tant parlé.
Ces diablesses de Warpaint sont de retour, et le relatif égarement de leur premier album semble loin, si on en juge ce premier titre. Mon petit coeur frémit déjà à l’idée d’écouter leur deuxième bébé.