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Les petites gens

Publié le 13 novembre 2013 par Nicolas Esse @nicolasesse

Faisons une expérience. Prenons un individu mesurant 1m97. Installons-le debout devant nous. Que voyons-nous ? Rien! Très bien. Maintenant, demandons-lui de reculer de deux pas. Àâââh. Voilà que l’horizon se dégage. Encore deux pas et on voit les nuages. Encore cent pas et le voilà réduit à la taille d’un petit doigt. Plaçons maintenant sous ses chaussures une rampe d’escalier. Demandons-lui de descendre. Quatre marches et il disparaît à moitié. Dix marches et il disparaît tout à fait.

Les petites gens peuvent être très grands, ce n’est pas une question de taille, juste une question d’éloignement. D’abaissement. Les petites gens vivent très loin au fond de l’horizon, un étage au-dessous du niveau des voitures, parfois même un étage au-dessous des couloirs du métro. Blafards, ils arpentent des kilomètres de lumière artificielle à la recherche d’une issue, d’une ouverture, d’une trappe qui déboucherait sur le monde d’en-haut. Ils marchent, sans relâche, humblement, huit, dix ou douze heures par jour. Ils traversent toujours entre les clous, les petites gens, le petit peuple; ils travaillent dur et ils économisent. Ils achètent à crédit un écran, une action spéciale, achetez maintenant, payez l’année prochaine en 72 mensualités. Ils pensent à des vacances, mais avec les enfants…

Un jour, ils prendront des vacances. Un jour ils auront une maison. Un grand garage. Une voiture. Un jardin immense et une haie tout autour. C’est ce le présentateur leur dit, le soir, à la télévision.

La nuit, les gens d’en bas s’endorment en rêvant de soleil mais le réveil sonne toujours à cinq heures et il n’y a jamais de lumière derrière la porte ouverte de l’ascenseur.



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