Paul de Brancion | [Tristesse du soir]

Publié le 15 novembre 2013 par Angèle Paoli
« Poésie d’un jour

[TRISTESSE DU SOIR]

Tristesse du soir
aux nuages gris
sur les rizières


les phares s’allument sur la route numéro 7
qui mène à Kompong Cham


avons chanté la Marseillaise
entre deux zébus entravés
devant les enfants du village

stupéfaits


trois femmes mâchent le bétel


le soleil peut-il se coucher sur le Cambodge
sans évoquer le sang
des hommes noirs


il n’y a plus de singes
dans la forêt noyée


Vie lacustre
Mékong
loin du renversement de la mousson
l’eau haute
la pêche possible

habillés de lin blanc
sur un vieux bateau de bois coloré


les liserons d’eau dansent
les enfants sautent dans le fleuve
nudité ambrée
père mère grand frère
surveillent les filets
bouteilles de plastique
en flotteurs de fortune

deux mondes se croisent


« à la saison humide
les poissons mangent les fourmis
à la saison sèche
les fourmis mangent les poissons »

disent les Khmers de l’eau

les enfants saluent
en criant   sautant de joie
  les plus âgés
  vérifient sans mot dire
  l’équilibre de leur barque
  que le remous
  va chahuter


Paul de Brancion, Qui s’oppose à l’Angkar est un cadavre, suivi de Kim Hourn, livret d’opéra, Éditions Lanskine, 2013, pp. 55-56-57.




PAUL DE BRANCION

Source

■ Paul de Brancion
sur Terres de femmes

Ma Mor est morte | lecture d’AP
Ma Mor est morte | lecture d’Evelyne Morin
→ Sur un bateau léger | Nant’a u ligeru battellu

■ Voir aussi ▼

le site de Paul de Brancion




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