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La couronne verte / Kasischke

Publié le 09 septembre 2013 par Lulamae Barnes @lulamaeA

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Véritable rituel, les vacances de printemps aux Etats Unis marquent le passage à l’âge adulte pour les élèves de terminale qui partent une semaine entre eux dans un cadre exotique. Face à l’insistance de leur amie Terri, Anne et Michelle renoncent à une croisière dans les Caraïbes et optent pour les plages mexicaines. En dépit des mises en garde maternelles, Anne et Michelle acceptent d’aller visiter les ruines de Chichén Itza en compagnie d’un inconnu…pour leur plus grand malheur. Un roman aussi troublant que profond.

Après Les revenants, j’étais curieuse de voir ce que les autres oeuvres de Kasischke pouvait me révéler de nouveau sur son auteur et j’avoue ne pas avoir pris un risque phénoménal en prenant mon temps sur ce petit roman de 216 pages.

J’ai ainsi retrouvé avec plaisir la vision distanciée de l’auteur sur les pratiques de sa propre société. Le noyau de l’intrigue étant ici le sacro-saint spring break qui met en effervescence la sphère estudiantine américaine tous les ans à Pâques, vous n’échapperez pas à un tableau qui au pire horrifie et au mieux agace. Seulement, Kasischke a cela d’admirable qu’elle ne semble jamais juger en tant que personne. On sent rarement une présence critique de l’auteur -retranchée, en embuscade derrière ses mots-  qui pourrait s’avérer pesante à la longue mais, au contraire, elle réussit à donner un air de détachement objectif à la narration si bien que les mots et les actions mis en scène semblent parler d’eux-mêmes pour dire des choses qui ne sont pourtant jamais prononcées. Cette sensation est réellement étrange mais doit relever d’une forme élaborée de maitrise du sens et de la portée des mots.

On retrouve également dans ce roman les nombreuses comparaisons et métaphores que l’on pouvait également trouver dans Les revenants. La langue de Kasischke est foisonnante d’images, de liens ténus tissés avec patience entre des choses n’ayant a priori aucun rapport. Cette augmentation du langage par la métaphore enrichit l’oeuvre de sensations et de visions mais s’avère parfois pesante, surtout dans le cas d’une oeuvre assez courte comme ici.

Je confesse volontiers que de temps en temps, ne pouvant plus supporter la tension croissante j’ai survolé certains passages pour n’en saisir que le reliquat d’action. D’ailleurs je dois signaler que la mise en page -déjà caractéristique dans Les revenants- ne fait qu’accentuer cet effet. L’oeuvre est ainsi divisée en plusieurs parties, elles-mêmes subdivisées en chapitre si courts qu’ils sont pratiquement conçus comme des nouvelles. Ils ont un sommet en haut duquel la tension (l’attention) est à son maximum. S’ensuit une sorte de mini-chute dont on finit par repérer la présence à l’avance. D’où la tentation de "jeter un coup d’oeil" à cette chute au moment où l’action traine un peu.

D’ailleurs, si la tension poussant le lecteur à continuer sa lecture était plutôt bien manipulée dans Les revenants, je dois avouer que j’ai été un peu déçue par l’amorce trop longue d’une action dont on connait déjà pratiquement l’issue rien qu’en lisant la quatrième de couverture.

De même que les métaphores, on remarque dans La couronne verte la présence d’un élément répétitif sous le signe duquel le roman est placé. Cet élément était la lune dans Les revenants. Ici il s’agit de la plume et de la couleur verte, éléments que l’on retrouve sur la couverture de cette édition. Les couleurs ont une place prédominante dans cette oeuvre mais vous noterez la récurrence particulière de la couleur verte sur laquelle l’auteur s’appuie énormément pour faire écho à l’autre pilier de ce roman : la croyance maya.

A l’aide de ces quelques éléments Kasischke explore -comme dans Les revenants- cet environnement naturel mais aussi humain que nous croyons si familier et accueillant pour mieux mettre en lumière la menace sournoise qui se tapit au coeur de ce (ceux) que nous croyons connaitre.

Je qualifierais ce roman de sans prétention car ce qu’il contient n’est plus ni moins que ce à quoi on s’attend en lisant la quatrième de couverture. N’attendez rien d’original sur le plan de l’action mais n’hésitez pas si vous avez envie de rentrer dans l’univers paradoxalement étonnamment lucide et onirique de Kasischke.


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