En rentrant d’une réunion Tupperware bien arrosée, Œdipa Maas apprend qu’un ex-petit ami l’a nommée exécutrice testamentaire. Le legs est étrange : des dizaines de faux timbres, signes de ralliement d’une bande de conspirateurs déjantés…Thomas Pynchon dessine la fresque impitoyable d’un monde sans queue ni tête, et brouille les pistes avec une allégresse contagieuse.
Je savais en m’attaquant à Pynchon que je m’attaquais à une forteresse. Déjà parce qu’il s’agit de trouver son avis propre quand on ne fait qu’entendre des louanges de l’auteur. Mais pour être tout à fait honnête ce n’est pas la raison principale. En réalité je ne cesse de revenir à Contre-jour et de buter contre, dans un mouvement qui ne me mène jamais plus loin que la page 40. Ce livre de mille pages prend la poussière et en attendant je ne sais toujours rien du fameux Pynchon, ce génie, en tout cas parait-il.
Me voilà donc pleine d’optimisme attaquer Vente à la criée du lot 49. Qui commence sur les chapeaux de roues puisque, une fois n’est pas coutume, le roman commence à l’endroit exact où se termine la quatrième de couverture.
Jusque là tout va bien. Sauf que rapidement je me trouve embarquée dans un récit que je ne parviens pas à suivre tant il bouleverse mes habitudes.
La narration, déjà, est atypique. Elle est convulsée, pleine de spasmes qui connaissent parfois un répit, pour nous livrer de gros morceaux soporifiques.
Le personnage principal est quant à lui indéfinissable. Quelques détails épars nous sont livrés mais à part l’envie de percer à jour le motif (opaque) de l’intrigue, cette brave Œdipa reste un mystère insoluble.
J’en viens donc au fait. Ce roman possède l’aspect (et utilise les caractéristiques) du rêve dont voici quelques éléments :
Une temporalité inexistante : l’action passe d’un lieu à un autre sans transition. Les décors se succèdent sans lien apparent et il est extrêmement difficile de retracer un parcours cohérent et structuré du personnage principal. A plusieurs reprises, au contraire, la narration se détend et s’accroche à une parcelle de temps sur laquelle toute l’attention est focalisée -avec force détails- durant de longues pages.
La variété des figures anonymes. Comme dans un rêve, les personnes semblent surgir de nulle part pour s’évanouir aussi rapidement après avoir tenu des discours des plus décousus.
L’impression de saugrenu. Le rêve a cela de particulier qu’il a les dehors de la réalité tout en gardant avec elle ce léger décalage qui suffit à nous alarmer sur la nature de ce que nous croyons vivre pour de vrai. Ce roman produit la même sensation. À ceci près que je la rapprocherais plus volontiers de la sensation produite par un cauchemar. On ne comprend rien de ce qui se passe sous nos yeux, on sait que cela aura fatalement une fin (on se réveille ou l’on ferme le livre, c’est égal), mais en attendant nous sommes prisonniers d’un engrenage contre lequel nous ne pouvons rien sinon être patient.
Voilà l’effet qu’a produit sur moi Vente à la criée du lot 49 qui me semble pour ma part plus relever de l’expérience (personnelle, pour l’auteur) littéraire -comment retranscrire le rêve en mots- plutôt que du roman.