Ma capacité à me concentrer était donc moyenne.
Ma bourgade était en train de sombrer dans la psychose grâce à un combiné de froid intense et de voies fermées sur un pont.
Chez les riches, on s'invente les catastrophes qu'on peut, pensa le Philippin.
Je me suis à avoir espoir en la radio commerciale.
J'avais devant moi une femme tout ce qu'il y a de plus 2013, surmaquillée et atrophiée de la potentielle chirurgie plastique (ses yeux! ses yeux étaient bridés, c'était de la chirurgie plastique j'en suis maintenant certain!) qui aurait pu me demander d'une seconde à l'autre qu'on se prenne en photo sur son Iphone. Elle parlait encore comme une ado. Genre, style, comme. Pendant un instant, quelques 4 minutes version radio, nous étions passé dans le vortex de 1985. Avec cette absence de crainte du monde de demain puisque nous étions invulnérables et que le monde nous appartenais.
C'est con, la chanson de Tears For Fears me donnait une légère envie de pleurer. Comme si je réalisais pleinement que je n'aurai plus jamais cet âge, que je ne revivrais plus jamais ce temps, peut-être que je n'aurai plus jamais cette assurance d'antan qu'il n'y avait rien au monde qui pouvait m'arrêter.
Maintenant que je réalise que ce monde que nous tentions de mater à notre image nous échappe, je suis debout, zombie, et je n'écoute pas ce qu'Élodie me dit. Je ne crois pas rêvée, elle m'a parlé quelques secondes de la finale d'Occupation Double. Je crois que c'est là que les pavillons de mes oreilles se sont cloîtrés.
"...deux, trois n'est-ce pas?..." me dit-elle, interloquée.
"Hein? que...quoi?" ai-je demandé, atterrissant de la lune.
"Toi Hunter, t'as surement aussi deux ou trois cartes de crédit?"
"Non, j'en ai une seule, pourquoi?"
"Hein? ça ne se peut pas! de nos jours tu n'as qu'une seule carte de crédit?"
"Ben...oui...je...je m'excuse?"
"Je sais pas comment tu fais! tu dois pas dépenser beaucoup parce que moi je ne sais pas comment je ferais avec une seule carte"
Je n'ai pas compris son raisonnement et ma fatigue m'a empêché de chercher à savoir. Je me suis bien gardé de souligner que pour un gars qui ne dépenserais pas beaucoup j'avais en l'espace de quelques jours investi sur une voiture neuve, puis acheté avec le beau-frère et sa douce un condôtel* au coeur des Laurentides.
J'avais encore un peu envie de pleurer.
I hope they live to tell the tale
I hope they live to tell the tale...
*Il s'agit d'un condo qui nous appartient maintenant, autour d'un lac et dont la location est gérée par une gestion hôtelière qui se garde une pointe de tarte dans la location et nous envoie le reste de l'argent. Bien entendu ce condo est 100% à nous à une vingtaine de reprises sur 365 jours et quelques fois à 20$ la nuit pour parents, amis ou invités. Un bonheur à tous les niveaux.