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Comment devenir écrivain... (Caryl Férey)

Publié le 27 novembre 2013 par Despasperdus

« Mon frère souffrait d'injustice chronique. Ça le rendait marteau, comme Che Guevara, à la différence près que sa faucille était un tacle bien appuyé lors des matchs de foot. »

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Comment devenir écrivain quand on vient de la grande plouquerie internationale n'est pas un guide pratique. Il s'agit de l'autobiographie d'un auteur que j'aime particulièrement. [1] [2]

"L'âge de pierre", la première partie du récit est consacrée à ses années de jeunesse et d'adolescence, ses rapports conflictuels avec son frère aîné, leur passion du foot et de Connors, l'école, la musique, les filles, ses premiers émois amoureux, les copains, les vacances chez son arrière grand-mère... Et, les récits délirants qu'il écrivait pour ses copains.

« Puisque tu passes ton temps à écrire, pourquoi tu ne deviendrais pas écrivain ? »

Dans la seconde partie du récit, "l'âge de fer", le narrateur renonce à poursuivre ses études. Il enchaîne les boulots alimentaires pour écrire, mais ses manuscrits ne séduisent aucun éditeur. Ses deux premiers romans seront publiés par un ami qui s'improvise éditeur. Quand les éditions La Baleine acceptent Haka, Férey croit enfin échapper à la galère. Il "monte" vivre à à Paris chez un ami.

« J’écrivais des lettres au Crédit Agricole de Montfort pour les calmer, des lettres à la Arturo Bandini où je leur expliquais la chance qu’ils avaient de compter un écrivain dans leur boutique, un gars qui se retenait de ne pas gagner des millions tout de suite pour garder la tête froide – y avait-il besoin de rappeler les ventes faramineuses du fameux « Poulpe », aux éditions Baleine ? - et restait concentré avec une humilité toute brélienne sur l’écriture, ma poule aux yeux d’or, mais que je pensais à eux, le Crédit Bouse, le jour où j’achèterais un truc genre maison ou hôtel particulier avec mes droits d’auteur ? Et mes amitiés à votre comptoir, hein ! »

Mais, là encore, l'écrivain en herbe va de déception en désillusion. La Baleine coule, l'avance sur ses droits d'auteur est misérable et la diffusion du bouquin auprès de la presse et des libraires lamentable, si bien que le parcours du combattant se prolonge, même si des "plans" plus ou moins foireux se présentent à lui pour améliorer son RMI. Il écrira sans guère de succès pour la télé et, même pour le guide du Routard avec un voyage gratos au maroc à la clé pour narrer les nouvelles aventures d'un aventurier et, accessoirement pour oublier un roman qu'il traîne depuis des années. Paradoxalement, c'est ce roman d'infortune qui lui ouvrira les portes de la Série Noire et de la Nouvelle-Zélande pour Utu avec au bout la reconnaissance...

« "Plutôt crever" en cale sèche, je me suis alors tourné vers la télé. (...) Pas besoin de télévision pour savoir que les séries en questions étaient bien pourries mais, contrairement à certaines idées reçues, ce n’est pas facile d’écrire de la merde. »

Je vous recommande vivement cette autobiographie enlevée et réjouissante, pleine d'ironie, qui dévoile les difficultés d'un écrivain qui n'est pas issu du sérail...

Notes

[1] Zulu

[2] la jambe gauche de Joe Strummer


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