Un an déjà, ou encore quatre ans ?… Je laisse au lecteur le choix de la formule, n’ayant pas l’honneur de faire partie des déçus du Sarkozysme.
Mais faute d’avoir voté pour lui, j’avoue avoir régulièrement pris la défense de notre Président durant l’année écoulée, lorsque je sentais que la machine médiatico-journalistique s’emballait pour rien, infligeant un juste retour de manivelle à notre apprenti machiavel. N’est pas Mitterrand qui veut.
Pourtant, le 6 Mai dernier, Soir 3 a relayé un événement de la plus haute importance.
Un an jour pour jour après l’élection triomphale du petit père de la nation française, 2000 adhérents de l’UMP se sont réunis salle Gaveau, histoire de « fêter ça ».
Sauf que, flairant le piège partisan, Nicolas n’a pas daigné se déplacer, préférant se la jouer profil bas (ce qui, dans son cas, confine au pléonasme).
Du coup, l’ami François Fillon s’est dévoué pour prendre la parole. Nul ne saura jamais si l’abus de champagne millésimé ou la présence d’un public acquis à sa cause ont joué le rôle d’un quelconque Viagra mental, toujours est-il que, dans un élan lyrique de toute beauté, notre Premier Ministre a salué « un président qui, au fond de lui-même, reste un militant et un rebelle qui refuse d’être étouffé par les turpitudes du pouvoir ».
À ce moment-là, j’ai, moi aussi, failli m’étouffer.
C’est vrai qu’ils avaient tous de sacrées tronches de rebelles, les militants UMP de la salle Gaveau. Que dis-je des rebelles : des révolutionnaires, limite des délinquants, avec leurs foulards Hermès négligemment noués, comme dans un geste de provocation vis-à-vis des minorités qui gagnent moins de 15000 euros par mois.
Et là, j’ai dû en convenir. Nul besoin de fouiller très loin dans le passé de notre président pour y trouver, depuis ses origines, toute la rebellitude qui le caractérise.
Ancien élève de Sciences-po, il n’en obtient pas le diplôme à cause de notes éliminatoires en anglais (il aurait semble-t-il répondu, lors de l’examen oral et alors que le professeur refusait de lui serrer la main : « Get lost, fucking asshole », traduction presque littérale du « casse-toi, pauvre con » qui le rendra célèbre 30 ans plus tard.)
En 1974, il milite pour l’élection de Jacques Chaban-delmas et en 1981, il soutient Jacques Chirac. Ces deux rebelles célèbres paieront leur marginalité par de cuisants échecs. En 1995, sentant que Chirac est devenu beaucoup trop consensuel, Sarko le rebelle s’engage aux côtés d’Édouard Balladur, un voyou du XVIème arrondissement dont on retiendra surtout le « je vous demande de vous arrêter » consécutif à son humiliante défaite.
Encore une fois, cette rébellion fondamentale condamne Nicolas à un long exil politique. Et vous voudriez que 13 ans plus tard, arrivé enfin au poste tant convoité, notre président ait perdu cette faculté de se trouver partout sauf là où on l’attend ?
Moi, je vais vous dire où il était, Nicolas, le 6 Mai au soir.
En train de boire un coup avec ses potes José Bové et Olivier Besancenot.
Parce que la rébellion, en politique, c’est comme les OGM : on en dit du bien que si ça aide à se faire du blé.