Un petit tas blanc, un autre froissé à côté, et tant d'autres, ma tête sort des draps emmêlés.
Le froid, le chaud, la couette, ma vue qui prend forme, mes yeux gonflés, un autre tas blanc, tant d'autres, tout autour du lit. Des feuilles encore posées sur la pile de livres sur le chevet, des mots qui pendouillent, prêts à tomber plus bas sur le parquet.
Oui maintenant, je vois mieux les points blancs, ce n'est pas un plumetis, mais un champ de bataille. Une hécatombe, un cauchemar qui a duré depuis la pénombre, le soir puis toute une nuit envahissante.
Une pluie de mouchoirs froissés, des feuilles blanches mais aussi des débuts de lettres pour donner un sens aux derniers jours. Se quitter, si facile à dire, si facile à cracher à la figure de l'autre, si déchirant à vivre. Je suis éffondrée, dissolue dans cet espace encore un peu sombre, juste une lampe allumée dans le coin, peu de luminosité, peu de vie ici, juste moi, enroulée dans la couette, dans un tee-shirt, le sien, son odeur que je ne veux quitter. Lui que je ne veux plus voir.
Un regard, un geste, une émotion, sa main. Tout était allé si vite, notre complicité était devenue si proche, naturelle. Des mois de bonheur, des aperçus impossibles sur l'avenir mais un présent délicieux, des souvenirs à croquer chaque soir en m'endormant, en pensant à lui. Tout était si beau, si fort, si simple. je l'aimais, je ne peux encore l'aimer.
Force et violences des émotions, goufre dans lequel mes sentiments ont sombré, d'un coup.
Rien ne sera comme avant, rien ne lui sera pardonné, rien à garder, rien à lui dire.
J'ai pris mille feuilles pour lui dire, pour lui reprocher, pour me rappeler tout l'amour que j'avais envers lui, puis plus rien, un vide, un écoeurement de lui, du tout qu'il représente. Il m'a volé de l'amour, je voudrais à la fois tout lui cracher au visage, mais aussi oublier pour pardonner peut-être, pour espérer, ou plus égoistement pour ne garder que le meilleur, et l'aimer encore.
Je pleure encore, combien de litres avais-je en stock ? une marée montante, un flux sans fin de larmes, de mouchoirs, de rougeurs sous les yeux. Dormir, je le voudrais pour croire à un mauvais rêve, mais je lui ai dit Adieu, sans détour, définitivement.
Cette journée va être longue, je suis forte, non je pleure encore.
Quelle confusion !
Encore, autant que je l'aime, autant que je ne veux plus l'aimer.
Nylonement