J'ai longtemps fait ce même rêve lorsque j'étais enfant. Dans l'appartement de mes grands-parents, je dormais dans la dernière chambre, au bout du long couloir, et chaque nuit, un vampire venait. J'entendais ses pas, lents, sur le parquet, je ne pouvais fuir nulle part, il entrait, se penchait sur moi et me dévorait le cou. J'étais prisonnière de cette peur que je construisais de toute pièce, et dont je ne savais plus me défaire. Un soir, après s'être levée plusieurs fois, ma grand-mère excédée me dit : "C'est à toi de te débarrasser de ce vampire, je ne sais pas comment tu dois faire, mais trouve un chemin". Ce soir là (ou peut-être quelques nuits plus tard) j'empoisonnais mon vampire, une bonne fois pour toute, en lui offrant une tartine de fromage frais, dans laquelle j'avais dissimulé une gousse d'ail. J'avais trouvé, toute seule, une solution à la hauteur de mes 7 ans et je m'étais libérée d'un schéma éprouvant.
Plus tard, dans la vie réelle, il m'est arrivé plusieurs fois de me retrouver à nouveau dans une chambre au fond du couloir. Dans des situations qui avaient tout l'air d'être objectivement des impasses, voir même des gouffres desquels il semblait impossible de ressortir vivante. Mais chaque fois, je me reconnectais à ce demi sommeil et quelqu'un me soufflait : Trouve un chemin...
Le nouveau chemin, je crois que c'est toujours un nouveau point de vue de la situation. Une façon nouvelle de formuler l'épreuve. C'est notre capacité à chacun de déplacer le malheur, de changer notre vision du bonheur, d'évoluer, bref, de modifier notre interprétation de la situation. Cela me rappelle cette récente leçon apprise d'un chercheur scientifique, très pragmatique : Si tu ne trouves pas la réponse à la question, alors, change la question...
Je regarde 2014 comme on fixe l'horizon au bord de la mer. Pas d'impasse, mais l'immensité devant moi. Quelques pistes éparses, plusieurs vents qui me soufflent des élans contraires, parfois encore, le bruit du parquet qui craque pendant la nuit, mais je suis étonnement sereine. Une petite voix me dit : Stop, prends le temps ! Observe ! et trouve un chemin ! Yallah !