Un dernier geste pour ouvrir la baie vitrée qui donne sur ce jardin, des arbustes, une pelouse impeccable, des pots vides, l'hiver marque sa place, pas de fleurs sauf quelques pensées moins fragiles. Elle marche dehors, sous ses talons, le carrelage de la terrasse claque, il fait frais pour un jour de janvier, à peine froid.
Rien ne le retient plus, un dernier regard sur ce lieu, une tranche de vie, la sienne, enfin plutôt celle d'un couple et avant d'un duo d'amoureux. Ils bossaient ensemble, ils ont pris un verre, fait des missions ensemble sans prévenir leur hiérarchie de ce rapprochement intime. Le duo fonctionnait à merveille lors des audits, à tous les coins de la France, dans des entreprises en détresse. Leurs conseils faiseint mouche, leurs styles plaisaient, leurs soirées étaient parfois devant deux ordinateurs, studieux et professionnels, parfois plus horizontaux.
Un couple, un enfant, toujours du boulot, de l'argent, une vie haut-de-gamme, mais finalement peu de temps ici dans ce jardin, lui préférant le golf.
Elle descend les marches, le coin barbecue, une belle table en teck, mais si peu d'amis, plus souvent happés par des soirées avec des dîners pour leurs réseaux, pour leur business. Des relations mais finalement une routine, et puis un jour, elle a eu envie d'autres choses, de souffler en premier lieu.
Explosion de travail, succès, hiérarchie avec toutes les médailles du stress et des heures supplémentaires comme des couronnes de totale dévotion. Promotions pour l'un, pour l'autre, mais finalement une vie de famille faite de fatigues, d'épuisement, de colères, de rapports compliqués. Rien n'allait plus, elle avait dit stop, s'accrochant à sa fille.
Lasse de tout cela, riche certes, avec une belle voiture, un dressing plein de marques, des chaussures à profusion, des accessoires d'une féminité en plein repli, elle s'assied sur les marches, contemplant ce vide, ce lieu qui bientôt ne sera plus le sien. Elle le quitte, elle part.
Recommençant une autre vie, plus en harmonie avec son coeur, un métier d'art avec des relations humaines sereines avec ses futures clientes. Elle sourit de ce détail, de cette soudaine envie d'humanité, de contacts réels avec un parfum naturel.
Certes elle sera toujours femme, doublement d'ailleurs, pour elle, pour un autre regard, pour des bras qui un jour l'acceuilleront à nouveau. Belle et élégante, non pas dans une recherche de nouveautés, de marques, de rivalités et autres snobismes, non juste des pièces de sa grade-robe qui deviendront vintage, des basiques, des classiques, des souvenirs, et toujours elle dedans. Un trait d'union avec son passé, un tout qui restera en elle, en positif.
Elle se lève, se tourne une dernière fois.
Là sur la table, elle pose la clef, claque la porte.
Nylonement