Alexandre Jardin : « Soyons le changement que l’on veut voir »

Publié le 16 janvier 2014 par Copeau @Contrepoints
Opinion

Alexandre Jardin : « Soyons le changement que l’on veut voir »

Publié Par Léopold Saroyan, le 16 janvier 2014 dans Sujets de société

Le romancier Alexandre Jardin nous a accordé un entretien où il nous présente sa vision de l’avenir, de la France, et de l’engagement personnel pour redresser le pays.

Propos recueillis par Léopold Saroyan.

Dans L’Opinion vous avez publié une tribune intitulée « Le problème c’est nous ». Dans votre dernier livre Les Trois Zèbres vous parlez de ce type de personnes que vous appelez les charlistes, pourriez-vous nous détailler cela ?

Alexandre Jardin — Ce sont ces êtres qui sont leur propre recours, leur propre point d’appui, qui sont capables de raisonner hors cadre, j’appelle cela les charlistes. Charles de Gaulle était de ceux-là, il invente une France au bord de la Tamise, sans soutien et sans argent ; la bataille de Bir Hakeim a été remportée par des types qui faisaient la guerre en taxi-brousse, d’autres charlistes encore. Ils vont puiser très profondément en eux les ressources pour réussir, ils deviennent garants de la réussite de quelque chose, d’une réconciliation, etc.

De nos jours ce type de profil a presque disparu de la scène politique nationale. Il est absolument nécessaire qu’il réapparaisse, qu’un certain type d’individus porte ce genre d’ambitions et cette façon d’être. Pour reprendre l’exemple de Charles de Gaulle : c’est sa façon d’être qui a attiré la foule québecoise sous ce balcon où le général a prononcé cette phrase dont on se souvient tous. René Coty n’aurait attiré personne s’il avait été sur ce balcon, et François Hollande non plus, leur personnalité n’est pas identifiée par quiconque comme exceptionnelle.

Finalement, lorsque vous décrivez ce type de personnes, vous faites en creux un anti-portrait de la classe politique (dont François Hollande est un des derniers représentants en date) et du pays, vous décrivez tout ce qu’elle n’est pas et tout ce qui lui manque ?

Le malheureux Hollande est celui sur lequel tout le monde tombe puisqu’il est au pouvoir, mais il existe beaucoup de personnes comparables dans la classe politique française, à commencer d’ailleurs par son propre gouvernement essentiellement composé de clones, de gens qui gèrent l’État et qui ne sortent absolument pas des sentiers battus, incapables qu’ils sont de penser hors cadre. Or, dans le cadre, il n’y a plus de solution ; il faut penser hors cadre.

À la limite ce que vous dites c’est presque que c’est l’État qui est désormais le problème non ?

C’est devenu notre problème central, le mode de pensée des élites est devenu un problème. La manifestation typique de cela est le vote FN, ce parti sert aux français à envoyer des messages aux partis traditionnels, il n’y a pas 20 ou 25% d’électeurs qui croient au programme farfelu de ce parti, les gens ne sont pas idiots. Mais ils ne savent plus comment se débarrasser de leurs politiciens actuels, alors beaucoup de Français protestent et s’agacent : ils votent FN.

Le FN c’est le parti de Jean-Marie Le Pen, ne peut-on pas dire que ce personnage correspond à votre définition du charlisme ? Avec sa gouaille, sa manière de mettre les pieds dans le plat, etc.

Au contraire, c’est la caricature de l’homme politique français comme tout le reste de son parti, composé d’étatistes pur sucre, des immobilistes pur sucre, des effrayés par la vie pur sucre. Ils sont l’expression ultime de la classe politique française, ils ne sont pas hors système comme ils le proclament mais ils sont le produit du système politique actuel.

D’ailleurs, bien loin de penser hors cadre, ce parti propose de continuer dans la voie politique actuelle en rajoutant dix couches : on a un système bloqué, tout ce qu’ils proposent contribuera à le bloquer davantage encore.

Pour revenir aux hommes politiques classiques, leur principal problème est qu’ils ne sont pas des faiseurs, ils ne font en réalité rien. Non pas qu’ils sont inactifs lorsqu’ils sont aux manettes, ils communiquent et s’agitent beaucoup. Le problème est leur manière d’être : d’une façon générale, ce sont des individus qui n’ont jamais réellement travaillé de leur vie ; pour la plupart, ils n’ont ni créé d’entreprise ou d’association, ni par exemple alphabétisé telle ou telle personne dans les quartiers, ni suivi personnellement un chômeur, etc.

En un mot : faire. Cette question est sortie du débat politique, aucun journaliste ne demande aux politiciens ce qu’ils ont fait et savent faire de leurs dix doigts. Ont-ils créé des emplois ? On n’en parle même plus, on trouve normal d’élire des gens qui n’ont en réalité pas fait grand chose de leurs dix doigts.

Faire et faire fonctionner des systèmes sont deux choses totalement différentes. Hollande a fait fonctionner le PS pendant longtemps, ce n’est pas faire, la population française n’en n’a tiré aucun bénéfice. Lorsque de Gaulle reconstitue un État, il le fabrique, il le finance, il met en route des divisions comme la 2ème DB, etc. On a ici affaire à une personne d’action qui a attiré à lui d’autres personnes d’action, les Français libres. Par la suite, tout le personnel de la haute fonction publique nommé par de Gaulle après 1958 était un ensemble de personnes qui ont fait des choses dans leur vie.

Lorsque François Hollande président du Conseil Général de Corrèze distribue des iPads à tous les élèves scolarisés dans le département, n’est-il pas un homme d’action, un homme se faisant fort de faire ?

Non il fait fonctionner un système avec l’argent des autres. Et surtout, ce n’est pas lui qui fait tout cela, c’est l’institution qu’il préside.

Encore une fois lorsque de Gaulle créé la France Libre, il est caution personnelle du compte bancaire de celle-ci. Ce compte a fonctionné sous la signature du général, il a endossé les dettes en son nom propre, il n’a pas utilisé l’argent des autres.

Ces faiseurs dont vous nous parlez, pourriez-vous en décrire les principaux types ?

Il y en a trois sortes. D’abord les entrepreneurs qui créent des entreprises : ils réunissent des compétences, des capitaux (parfois en vendant leur appartement, leur voiture, etc.). Ensuite il y a les militants associatifs qui se bougent le derrière. Enfin, il y a les mutualistes.

Parmi ces militants associatifs de la seconde catégorie, faites-vous la distinction entre les militants associatifs « ordinaires » et ceux de structures largement subventionnés par l’État dont ils sont une courroie de transmission (SOS Racisme, etc.) ?

Ça dépend. À une époque ils faisaient. Par exemple SOS Racisme faisait à une époque du « testing » à l’entrée des boîtes de nuit, cette association n’était pas qu’une pompe à subventions. On peut contester cette démarche de testing comme on peut tout contester, ce qui compte pour moi c’est l’action : une personne dérangée par le racisme dans la société française peut faire le choix de regarder les programmes TV du samedi soir, ou bien d’aller sur le terrain défendre ses idées. Il n’est pas évident de se mobiliser comme cela et mon estime va plutôt à cette seconde catégorie.

D’ailleurs on remarque que les militants associatifs sincères dégagent de la joie, ces faiseurs sont heureux de faire ce qu’ils font, à l’inverse de ce qu’on peut voir chez les apparatchiks gestionnaires de système travaillant dans des contextes et ambiances lugubres.

On retrouve majoritairement aussi ce type d’apparatchik dans les grandes entreprises du CAC40, dirigés non par des faiseurs, des créateurs d’entreprises, mais par des gestionnaires. On notera le cas particulier de Claude Bébéar le fondateur d’AXA qui a clairement un profil de faiseur, de bâtisseur, d’entrepreneur. Il est né avec un turbo dans le ventre : il entre chez un petit assureur normand, à peine visible sur le marché français, pour en faire un leader mondial de son secteur 30 ans plus tard.

Ces trois profils que vous décrivez ont-ils des appartenances politiques précises ?

En ce qui concerne les trois profils dont j’ai parlé, entrepreneurs, militants associatifs, et mutualistes, c’est très différent : les premiers sont plutôt à droite, les seconds à la fois à droite et à gauche, et les derniers plutôt à gauche.

Mais dans leur comportement ils se ressemblent car ils sont charliens : ils n’attendent rien d’en haut.

Véronique Debue, adjointe au maire de Caumont-sur-Durance1  : elle n’engage pas un centime de l’argent de sa commune et parvient à résoudre le problème de l’accès aux mutuelles de santé pour ses administrés. Tout à l’heure vous me parliez de Hollande et de ses iPads : ils ont coûté de l’argent aux contribuables, alors que l’initiative de Mme Debue a permis le contraire, redonner du pouvoir d’achat en négociant les prix des mutuelles ! Elle est revenue aux sources du mutualisme dans l’assurance, là où ce secteur en France est dominé par des groupes financiers bien loin de cet esprit mutualiste qui permet aux gens de se reprendre en main, de rencontrer son voisin pour discuter afin de résoudre des problèmes, etc.

J’ai parlé de Véronique Debue dans un récent article dans L’Opinion parmi une dizaine d’autres projets similaires dans des domaines différents : réinsertion des femmes dans le travail, micro-crédit, entreprise, édition littéraire, etc. Tout cela se passe en France !

Tout ce dont je vous parle existait autrefois, on appelait cela la gauche mutualiste : ce courant a perdu face à cette gauche de hauts fonctionnaires et d’énarques, ces étatistes pur sucre qui se refilent le pouvoir entre eux.

Typiquement la promotion Voltaire de l’ENA, celle de François Hollande et de bien d’autres..

En effet : si l’on regarde le parcours individuel des membres de cette promotion, ont-ils créé quoi que ce soit, ont-ils alphabétisé quiconque, ont-ils fait ce que Mme Debue a fait dans sa commune ? Non, ils ont pris très tôt l’habitude d’utiliser le pognon des autres, l’argent des impôts.

Quelle ambition vous donnez-vous personnellement ?

Je vais essayer de réunir ces faiseurs : à côté de ma vie d’écrivain, j’ai cofondé le programme Lire et Faire Lire. Il implique aujourd’hui 14 000 bénévoles dans les 100 départements français, et est mis en œuvre par la Ligue de l’Enseignement et l’UNAF que l’on fait coopérer pour une cause supérieure à nos différences, car il nous paraît indispensable de transmettre l’amour de la lecture aux enfants, notamment ceux des quartiers populaires. On s’occupe de centaines de milliers d’enfants et on monte encore en puissance, on y arrive en activant des ressources dans la société française, des retraités par exemple.

Donc vous le voyez, on fait. On fait dans un contexte où le classement PISA de notre pays s’est encore dégradé, mais nous faisons le pari de la réussite, que l’on va faire aimer la lecture par les jeunes grâce aux retraités, aux anciens. Nous apportons une réponse concrète en invitant la population à se prendre en charge.

Ce que nous faisons est infiniment plus efficace qu’une loi votée au Parlement.

Je reviens aux deux organismes que vous avez cités et avec qui vous travaillez, la Ligue de l’Enseignement et l’UNAF. Ils sont quand même l’archétype de « l’association » complètement institutionnalisée : l’UNAF compte un tiers de haut-fonctionnaires dans son Conseil d’Administration et son financement est un pourcentage du montant total des allocations familiales versées en France. Pour la Ligue de l’Enseignement, on est sur des caractéristiques dans le même genre. Ici on a deux structures totalement institutionnalisées. Pensez-vous que vous allez les tirer, les arracher de cette institutionnalisation ?

Non, pas vraiment. Je parie que dans l’action tout le monde va se transformer, et en réalité j’ai trouvé des trésors de militantisme chez les gens de la base de ces associations, et parfois même chez certains des hauts dirigeants ! Quand on revient aux actions de terrain, en général la joie et l’enthousiasme reviennent vite.

Pour aller dans le fond de votre question : on ne peut pas transformer son pays sans utiliser les outils à disposition, j’active toutes nos ressources pour résoudre un problème concret et réel. En réalité d’ailleurs, le vrai pétrole ici ce ne sont pas les structures, ce sont les 14 000 bénévoles dont on parle, encadrés par les deux structures dont je vous ai parlé, ce qui n’est pas une mince performance. Localement le boulot est formidable : les plannings, les contacts avec les établissements scolaires, etc.

Il y a quelques mois, l’UMP a lancé une initiative consistant à offrir aux Français des cours particuliers, des aides administratives diverses et variées, bref un ensemble de services réalisés par des faiseurs. Êtes-vous sensible à ce type de démarche, et classeriez-vous donc l’UMP parmi les faiseurs ?

À l’époque je m’étais, comme vous vous en doutez, intéressé à la chose : gros effet d’annonce, réalisations réelles absolument marginales. J’aurais pu les classer dans les faiseurs si… ils avaient fait justement ! Pourtant, l’UMP est une organisation puissante qui ne manque pas de moyens !

J’ai tout fait pour que cette initiative avance, dans l’espoir d’ailleurs de faire d’une pierre deux coups en mobilisant également le PS en réaction à cette stratégie de l’UMP. Car autrefois le membre PS était un militant associatif, pas un notable ou un haut fonctionnaire. Par exemple, Pierre Mauroy dirigeait une association, la fondation Léo Lagrange, avec les mains dans le cambouis. Les hiérarques actuels de ce parti n’ont rien à voir avec Mauroy.

Et d’ailleurs, c’est peut-être chez les maires des grandes villes françaises que l’on trouve autre chose que des apparatchiks, mais plutôt de vrais faiseurs : par exemple Pierre Mauroy en tant qu’entrepreneur politique a complètement remodelé sa ville, entre le Lille d’autrefois et le Lille actuel c’est le jour et la nuit. De même à Bordeaux avec Alain Juppé ou à Lyon avec Gérard Collomb. On observera au passage qu’on ne parle pas beaucoup d’eux dans les médias…

Pour finir : chez ces faiseurs on observe une différence avec les apparatchiks politiques, ces derniers ont peur de leur prochain et produisent donc des normes, des règlements, supposés résoudre tel et tel problème. Les faiseurs eux n’ont pas peur de leur prochain, ils s’appuient sur lui pour faire équipe et franchir les difficultés.

Je disais il y a quelques instants que je souhaitais réunir tous ces faiseurs : j’espère parvenir à regrouper un noyau dur sur lequel les Français pourront s’appuyer

Vous parlez de ces faiseurs, ces gens qui sont le changement qu’ils veulent voir : sur Contrepoints nous publions le journal de Laurent C. qui nous décrit depuis plusieurs semaines les déboires qu’il subit parce qu’il cherche à quitter la Sécurité Sociale française. Laurent C. est-il un charliste ?

Je ne connais pas le fond du dossier, mais a priori il se prend en main. Personnellement, et ce n’est que mon avis personnel, mon émotion est plus forte lorsque je vois des gens agir en pensant à autrui. Maintenant, chacun à sa logique, et il est clair qu’il vaut mieux faire confiance aux entreprenants même s’ils ne font les choses que pour eux. J’ai toujours du respect pour ceux qui passent à l’acte, mais j’ai plus d’émotion lorsque je vois ce que fait Mme Debue.

Prochainement, j’ai rendez-vous avec l’association Force Femme, qui prend en charge des chômeuses de plus de 45 ans, un programme fait par des femmes pour des femmes composé de tout un tas de choses que Pole Emploi ne sait pas faire. Il y a là un mélange de culture entrepreneuriale et de solidarité qui m’émeut. C’est le même esprit qui m’anime lorsque je crée Lire et Faire Lire.

Pour l’anecdote, je me trouvais récemment à Port Leucate pour la réunion de Lire et Faire Lire qui a lieu tous les trois ans. Quelques femmes s’approchent de moi pour me dire : « Monsieur Jardin, on est contente que vous soyez venu à notre réunion ». Finalement, je me retrouve à la périphérie, et c’est une excellente nouvelle. Le projet m’a échappé : ce n’est plus l’initiative d’Alexandre Jardin, c’est un mouvement qui m’échappe désormais. Lire et Faire Lire n’est pas, n’est plus une sorte de Fondation Alexandre Jardin

On constatera au passage que cette posture est l’inverse de celle que l’on trouve en politique où tous les ministres cherchent à donner leur nom à une loi (Duflot, Taubira, etc.) avant même que le contenu de celle-ci soit cadré. Encore une fois ce charlisme est l’inverse de la politique.

C’est l’essence du charlisme que de renoncer à son petit soi. C’est ce qu’a fait le général de Gaulle, il a renoncé à lui-même : il était maurassien, il a accepté de gouverner avec des communistes ; il croit fondamentalement à la responsabilité et pourtant il a créé la Sécu ; c’est un colonialiste de fibre, il a parlé d’auto-détermination puis a donné l’indépendance à l’Algérie. Il a réussi à sortir de lui-même, son moi ne l’encombre pas, il est au service de la Nation et de ce qu’elle cherche et veut à un instant donné.

De nos jours, je ne connais aucun politicien qui aurait le début de ce type de qualité. Pour parler du président de la République, on peut être sûr qu’il en est totalement dénué depuis qu’on l’a entendu déclamer ce « Moi Président » durant le débat d’entre deux tours. Sans honte, il a choisi de marteler son moi au peuple français, il ne lui est même pas venu à l’esprit qu’il fallait qu’il dise Nous !

M. Hollande n’est donc pas un charliste si je comprends bien…

Non pas du tout ! Tenez, j’ai revu récemment Mme Debue, accompagnée de la femme qui a monté « I Loge You » qui cherche à contribuer à résoudre le problème du mal-logement. Elle allait secouer ses collègues de la FNAIM pour les faire contribuer à ce projet, etc. J’observais ces deux femmes, l’une parlant de santé publique, l’autre de mal-logement, venant toutes deux de milieux professionnels différents. Pourtant, j’avais l’impression de voir la même personne, ce même type de faiseurs – de faiseuses devrais-je dire – dont je vous parle depuis tout à l’heure.

J’estime que notre pays arrive au bout d’un cycle, d’une manière ou d’une autre ce sont les faiseurs qui vont prendre la relève, par la force des choses. Ce qu’on ignore ce sont les modalités, les calendriers, etc. Mais les non-faiseurs sont déjà morts ; mais ils ne le savent pas.

La désaffection des Français pour la politique le montre, plus de 80% d’entre nous n’ont aucune confiance dans leur personnel politique… Fin mai 2014, après les européennes, on risque d’avoir un Front National leader avec un Parti Socialiste probablement en quatrième position dans ce scrutin. La légitimité de ce parti au lendemain d’une telle déroute aura disparu et le rendra vulnérable au moindre mouvement social : quand on pèse 12 à 15% de l’électorat, on est plus que minoritaire.

Si je comprends bien votre raisonnement, ce sont les Français qui vont arracher certains sujets des mains des politiciens ? C’est finalement ce qu’a fait Mme Debue : elle a détecté une situation insatisfaisante et n’a pas fait appel à la politique mais à l’action.

Tout à fait, et c’est d’ailleurs pour cela qu’il faut fédérer tous ces faiseurs, pour améliorer encore leur impact sur la société française.

Nous avons par ailleurs une chance historique que ce scénario se réalise, c’est l’absence d’homme providentiel en France. Nicolas Sarkozy ne semble pas s’en être aperçu mais, en mai 2012, les Français l’ont mis dehors, ce n’est pas un homme providentiel. Il a eu 5 ans pour agir, il avait le mandat pour changer le logiciel français. Il devait, si mes souvenirs sont exacts, incarner la rupture : il n’a rien fait, s’est fait virer par les Français, et surtout, pire encore, il ne semble pas avoir amorcé la moindre démarche de critique. On entend ses lieutenants dire que mai 2012 est un malentendu, qu’il aurait fallu quelques semaines de plus à Sarkozy et on aurait vu ce qu’on aurait vu, etc.

Bref : il n’y a pas d’homme providentiel en France, et c’est une fantastique opportunité pour la société française de devenir adulte, de commencer à raisonner de manière moderne, à savoir horizontale et non plus verticale. La manière de gouverner basée sur la hiérarchie a fait son temps, elle n’a plus sa place dans notre société.

Vous savez, quand j’ai commencé à m’investir sur mes projets associatifs, j’ai été consterné par certains articles. Ils expliquaient que je faisais tout cela en prévision de… l’échéance électorale de 2017. J’avais ainsi été bombardé candidat à la candidature alors que cela ne m’a même pas effleuré l’esprit.

Ce n’est pas parce qu’on veut donner du pouvoir aux autres qu’on veut en prendre pour soi en somme. J’ai en effet lu dans un article du Point que vous aviez des ambitions personnelles, que vous cherchiez à acquérir des responsabilités, etc.

C’est drôle de ne pas comprendre à ce point, de faire un tel contresens. Je pense être une des bonnes personnes pour initier le rapprochement des faiseurs en France. J’ignore si nous aurons un jour besoin d’un leader comme j’ignore qui ce leader sera. Entre faiseurs, le leadership naît naturellement d’ailleurs, donner du pouvoir et en prendre sont deux choses totalement différentes.

Mais je comprends ces journalistes : ils sont dotés d’un cerveau habitué à décoder de manière classique l’action publique. Alexandre Jardin commence à faire ceci ou cela dans un cadre associatif, c’est qu’il doit convoiter une écharpe tricolore quelconque !

Merci beaucoup Alexandre Jardin.

  1. Mme Debue a réuni 240 familles de cette commune pour faire un appel d’offre auprès de mutuelles de santé, afin d’obtenir un prix de gros accessible à tous et à toutes.
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