Galerie de portraits (22) : Dieudonné

Publié le 20 janvier 2014 par Legraoully @LeGraoullyOff

Un physique assez quelconque mais un regard qui a fini par puer la haine de son prochain à cent mètres à la ronde, un système pileux tantôt taillé au carré tantôt laissé en friche pour achever de lui donner l’air d’un savant fou : voilà le faux humoriste mais vrai prédicateur qui a défrayé la chronique de ce début d’année avant d’être balayé de la une de la presse par une affaire autrement plus futile…

Dieudonné (car c’est bien lui) est-il véritablement un antisémite charpenté comme l’ont été Louis-Ferdinand Céline, les frère Goncourt ou le dessinateur Forain ? Quand le grand public a commencé à connaître son prénom, grâce à son fameux duo avec Élie Semoun, rien ne semblait le prédisposer à mal tourner : le fameux sketch « Cohen et Bokassa » ? Trop énorme pour être pris au premier degré, et ce n’était pas son engagement contre le Front National à Dreux qui allait nous faire changer d’avis sur ce personnage : un humoriste ni pire ni meilleur que bien d’autre qui aurait pu faire une carrière honorable mais sans plus s’il avait continué sur sa lancée au lieu de faire n’importe quoi et de vouloir se tailler une réputation de christ de l’impertinence dont la marginalité serait une preuve de génie.

Car le seul mérite de Dieudonné est d’avoir compris une chose : c’est qu’un humoriste, s’il est un artiste, ne peut pas se contenter de produire au kilomètre des blagues Carambar et autres niaiseries consensuelles comme on en passe sur Rire et Chansons. Seulement voilà, n’est pas Coluche (ou Desproges ou Choron) qui veut et, depuis qu’il l’a découvert, comme il n’a ni le talent ni l’intelligence suffisante pour être le trublion qu’il rêverait d’être, il fait n’importe quoi. À sa décharge, il faut reconnaître qu’il est un peu victime du qui-vive, qui confine parfois au ridicule, sur lequel vivent les antiracistes depuis quelques années : on lui a collé un peu trop hâtivement l’étiquette « antisémite » le jour où il a joué un rabbin faisant le salut nazi et clamant « Heil Israël », ce qui n’était finalement qu’une dénonciation (maladroite, il est vrai), du fait que l’État d’Israël, par son attitude belliqueuse et ségrégationniste, commet ce que sa création était censée dénoncer ; depuis ce jour où il a réalisé à quel point l’antisémitisme était (à juste titre) un tabou de notre société, il prend plaisir à le transgresser non pas par haine des juifs mais simplement pour le plaisir de transgresser un interdit, comme un sale gosse qui tire la langue parce que c’est interdit.

En fin de compte, oui, Dieudonné n’est que ça : un sale gosse. Là où quelqu’un comme Siné, après avoir essuyé une critique aussi infamante, ce serait battu pour laver son honneur, Dieudonné prend un malin plaisir à le salir de plus belle, comme un enfant mal élevé qui se roule dans la boue rien que pour faire râler maman. On dirait qu’il n’a pas la maturité nécessaire pour faire la différence entre le premier et le second degré ; il est persuadé que faire baptiser sa fille par Le Pen et inviter Faurisson sur scène font de lui un humoriste de génie mais ça ne fait rire personne et, surtout, ça fait une publicité inespérée à ses anciens ennemis ! A-t-il vraiment conscience que ça ne peut pas ne pas être pris au premier degré ? Si ça se trouve, même pas !

Tout ça pour dire que l’ostracisme médiatique dont il fait l’objet n’est ni étonnant ni scandaleux : il a scié lui-même la branche sur laquelle il était assis. C’est un peu facile, de se présenter comme un martyr de la liberté d’expression quand on a tout fait pour se marginaliser, qui plus est en prônant la privation de liberté pour les autres pour des raisons d’origine ethnique ou de préférence sexuelle (car la fameuse quenelle est à n’en pas douter homophobe, reportez-vous à l’article de Jonathan Hoesch) ! Mais c’est typiquement infantile, ça, de ne pas assumer ses bêtises… Fallait-il pour autant interdire son spectacle ? Non, c’était lui faire trop d’honneur, c’était lui donner une importance qu’il ne mérite pas, c’était faire double emploi avec les condamnations dont il a déjà été l’objet, c’était donner de l’eau au moulin de la thèse suivant laquelle l’État persécuterait les néo-réacs simplement parce qu’ils le dérangent. Il vaut mieux le traiter comme il le mérite, c’est-à-dire par le mépris : c’est bien tout ce que mérite un sale gosse qui pigne parce qu’il a cassé ses jouets…

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