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d'après Maupassant : "Ma femme"

Publié le 27 janvier 2014 par Dubruel

À trente ans, je ne pensais pas à me marier.

Ce premier samedi de février,

J’étais invité en Normandie

Au mariage de mon cousin Gerlande.

Ce fut une vraie noce normande.

On se mit à table à cinq heures,

On mangeait encore à onze heures.

Comme voisine, j’avais une demoiselle Carette,

Fille d’un colonel en retraite.

C’était une jeune blondinette,

Bien en forme, hardie et verbeuse.

Durant toute cette journée de fête,

Elle m’accapara,

…M’assomma.

Je me disais : ‘’Cela passe pour aujourd’hui

Mais demain, je file. Ça suffit.’’

Vers minuit, les femmes se retirèrent.

Les hommes restèrent

À fumer en buvant

Ou à boire en fumant,

Si vous aimez mieux.

À deux heures, le château dormait, silencieux.

Repu de nourriture,

Je montais me coucher.

J’étais si éméché

Que je peinais à trouver ma serrure.

La porte s’ouvrit. Je heurtai mon lit.

Je m’étendis et m’endormis

Je fus réveillé par une grosse voix

Qui disait près de moi :

-« Encore couchée ? Il est dix heures, Éva ! »

Une femme répondait : -« Déjà ! »

Je me suis demandé

Ce que cela signifiait.

Où étais-je ? Qu’avais-je fait ?

Mon esprit flottait dans un nuage épais.

-« J’ouvre tes rideaux. », reprit la grosse voix.

Puis des pas s’approchèrent de moi :

-« Qui est là ? »

Une terrible lutte débuta.

Les voisins accoururent, affolés.

On ouvrit les volets :

Je me colletais avec le colonel Carette !

J’avais dormi auprès de sa fille cadette.

Le colonel, enfin calmé,

M’a interpellé :

-« Bien. Que comptez-vous faire ?

Moi, je ne vois qu’un seul moyen

Pour vous tirer d’affaire :

Vous devez épouser ma fille. »

Ce propos me fit sortir de ma coquille :

-« Non, je vais m’en aller ! »

-« Ne plaisantez pas, s’il vous plait.

Sinon, je vous brûle la cervelle !

Vous avez séduit

Une prude demoiselle.

Pour vous, c’est tant pis. »

-« Ne me sermonnez pas,

Je ne l’épouserai pas. »

Peu après, mon oncle Gerlande

Et le colonel se mirent à discuter :

-« Qu’officiellement il la demande,

Et après, nous allons négocier

Les conditions du contrat. »

Cette perspective me soulagea.

Je consentis

Et regagnai Paris.

Dès le lendemain, j’étais avisé

Que ma demande était agréée.

Les bans furent publiés,

Et les billets de faire-part envoyés.

Puis je me suis retrouvé avec elle

Au pied d’un autel.

Je la regardais.

Elle pleurait.

Au soir,

J’entrai dans son boudoir

Avec l’intention

De lui faire connaître

Mes résolutions.

J’étais le maître

Maintenant !

Elle vint à moi gravement :

-« Je suis prête à faire ce que vous ordonnerez.

Je me tuerai si vous le désirez ! »

Alors, je l’ai l’embrassée

Et fus bien récompensé.

Je suis marié depuis cinq ans

Et ne le regrette nullement.


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