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Jean-Pierre Siméon | [Tandis que j’écris ce poème tu dors]

Publié le 16 février 2014 par Angèle Paoli
« Poésie d’un jour

[TANDIS QUE J’ÉCRIS CE POÈME TU DORS]

XVIII

Tandis que j’écris ce poème tu dors
j’écris pour que tu dormes
pour que ma phrase veille sur ton sommeil
car il n’y a pas plus grand péril que les songes
dont on revient toujours séparé de soi-même


il faut que ces mots respirent avec toi
qu’ils boivent la nuit à tes lèvres
et qu’ils nous lient tous deux face à la mort
selon la loi des simples


il y a ces solitudes infinies que nous sommes
chacune de nos pensées
est un arbre grelottant
et la peau durcit
qui sépare les paroles et sépare les âmes


j’attendrai jusqu’à la consomption
de la dernière étoile
penché sur ton visage et sur l’ombre
où étrangement tu disparais


je formerai un langage autour de ton sommeil
il sera tissé de ce vieux lin
qu’on prend dans les armoires
langage que j’étends
sur toi
et qu’il épouse un rythme
dans ton cœur


tant que tu dormiras
mon poème tiendra la veille
cherchant dans la nuit ton œil bleu


nous attendrons ainsi
le jour
inexplicable


puisse-t-il mon poème parlant au bord des draps
ôter la pierre
sur ton souffle


Jean-Pierre Siméon, Lettre à la femme aimée au sujet de la mort, Cheyne Éditeur, 2005, pp. 51-52.





JEAN-PIERRE SIMÉON

Jean Pierre Simeon

Source

■ Jean-Pierre Siméon
sur Terres de femmes

On voudrait tenir le feu entre ses dents (poème extrait de Presque peinte sur un mur obscur )

■ Voir aussi ▼

→ (sur le site du Printemps des poètes) une fiche bio-bibliographique sur Jean-Pierre Siméon




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