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Papa, je suis une femme !

Publié le 24 février 2014 par Gentlemanw

Ah oui, un jour cela devait arriver, un matin d'ailleurs, un début de semaine, un hasard dans le calendrier. Mais un jour important pour moi, restera-t-il dans ma mémoire ? oui une trace, un changement, pas comme une date.

Maman, un autre week-end m'avait expliqué, m'avait prise entre ses bras pour me parler d'amour, de couples, de vie, de tout, de rien. On avait pris le temps de s'enrouler dans la couverture sur mon lit dans cette petite chambre du nouvel appartement depuis leur divorce. Là au chaud, on avait parlé encore, de moi surtout, d'eux un peu, une histoire entre deux adultes, avec toujours le même amour pour nous, leurs enfants, mais plus entre eux. Une fin logique, une fin que je digérais mieux maintenant après plus d'un an d'incompréhension, de tensions, de larmes parfois. Ils étaient séparés comme tous les parents de mes amies, je devais être l'avant-dernière avec des parents mariés, enfin avant. Là, ce jour-là on a parlé de bébé, de ma naissance, du pourquoi et du comment, même si je savais, sans vraiment tout savoir. A cette époque, un baiser sur la bouche me paraissait encore sale, et des gens nus dans un lit à la télé, me paraissait être un jeu. 

Alors on a repris depuis le début, depuis le moment où moi aussi, je deviendrai une femme. Moi la jeune fille déjà au collège, pas trop loin du lycée, la plus grande de la classe où les garçons restaient collés au sol, les filles les dépassant tous. Je changeais, je le voyais. Ma grande soeur était un adolescente avec ces humeurs, son statut de jeune femme, son corps, ses seins, ses copines.

J'étais la même, en modèle plus petit pour l'instant, mais un jour j'aurai mes règles. Surprise, aucune inquiétude, mais c'était la loterie du quand, le comment ayant été abordé avec ma mère ce jour-là. Plus encore mon père, ce mâle discret mais si délicat, si à l'écoute de nos chamboulements, d'autant que c'est lui qui nous avait pris pour la garde des semaines, des jours de classe. Il était devenu un père omniprésent, mais comme déjà avant il nous séchait les cheveux, s'amusait à nous vernir les ongles, on lui paralait de féminité sans souci. Différent des pères "bières et foot", plutôt branché "mode et cuisine". On en rigolait, on pouvait donc parler de nous, les filles de la maison. Avec lui, j'ai parlé de règles, de tampons, de douleurs, et toujours il a été là.

Honnêtement, je l'ai senti perdu parfois quand cela devenait trop important, trop douloureux, entre les sentiments qu'il a toujours pour sa jeune fille que je serai toujours, cet amour protecteur, et son impossibilité de ressentir cela, son corps n'étant que celui d'un homme. On en a ri, après surtout.

Et un jour, je suis devenu une jeune femme, avec un sourire, sans sermon, mais en ayant parler d'autres détails, il avait convenu que les préservatifs seraient aussi indispensables que les tampons. Tout le monde savait où les trouver, comment les consommer aussi, la recette de cuisine n'était pas fournie. Mais cette liberté, avec le temps, j'ai compris qu'elle était importante, distribuée par touches, avec ce recul complexe d'un papa qui parle de corps de filles, de femmes, de nos corps, avec des définitions, des ressentis, des mots. Nous sommes différents, et certains jours, j'ai pu comprendre sa détresse, mais aussi son regard fier de moi. Les deux étaient touchants, les deux l'avaient touché.

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