"C’est pas pour critiquer, mais je vous l’annonce officiellement ce soir : j’ai pris la présidence du comité de soutien pour la réélection de M. Joël Batteux, M. Archibald Haddock n’étant pas disponible, légèrement indisposé. Donc je vous le dis tout net, madame et messieurs : vous pouvez rentrer chez vous ! Je note d’ailleurs que M. Le Merrer a préféré ne pas venir. Sont pas bêtes à l’UMP, ils ont tout de suite compris qu’ils n’ont aucune chance face à une 6e candidature de Joël Batteux.
Car
Saint-Nazaire compte deux monuments, je regrette d’avoir à vous le rappeler,
bande d’ingrats : la base sous-marine et Joël Batteux. Je ne m’attarderai
ce soir que sur le plus sympathique des deux… Joël Batteux, plus connu sous son
nom de scène « Battling Joe », Jojo pour les indigènes.
À propos de n’importe quoi, quelqu’un sait-il où se terre ce Claude Evin de sinistre mémoire ? Voilà un vrai mystère. Comment les Nazairiens ont-ils pu élire un monstre qui a persécuté des millions de gens qui ne lui avaient rien fait, des millions d’inoffensifs fumeurs et sympathiques buveurs ? Evin : le bourreau des buvettes, la terreur des terrasses, le sicaire des civettes ? Un buveur d’eau, comme la plupart des grands criminels de l’humanité.
Au
contraire, Jojo fut un authentique résistant. Oui, notre Jojo a résisté au
fascisme sanitaire de Claude Evin : toujours la clope au bec, comme le
général de Gaulle ; jamais le dernier à lever son verre, comme Winston
Churchill, Batteux est un héros dont Saint-Nazaire peut s’enorgueillir.
Saint-Nazaire, riante bourgade de la banlieue ouest de Nantes, a été fondée par cet imbécile de Napoléon III.
Il aurait pu faire pire ! Fonder La Roche-sur-Yon, par exemple, comme le fit avant lui son tonton Napoléon Un, lui aussi de sinistre mémoire, comme Claude Evin.
Mais la passion m’emporte, je dérive, je « vague la nuit dans des lumières narratives »*…
Restons dans « la métropole Nantes Saint-Nazaire » comme disait en riant Jean-Marc Ayrault - ce qui ne luiarrive pas tous les jours, surtout en ce moment.
Saint-Naz’ ! « Ach ! Gomment beut-on aimer ein ville auzzi mocheu ? » répétait avec tendresse le regretté Reichsminister Fritz Todt, à qui Saint-Nazaire doit tout. Eh bien oui ! C’est possible. À chaque fois qu’on dit ça, l’excuse est toute trouvée : c’est la faute aux Fridolins, rapport qu’il a fallu tout reconstruire. On a dit beaucoup de mal des Chleuhs, mais sans les Doryphores, Saint-Nazaire aurait-elle sa base sous-marine, chef-d’œuvre de l’architecture boche - et aujourd’hui destination de milliers de touristes en birkenstock et chaussettes blanches ? Saint-Naz’ ! Ses ouvriers en bleu de chauffe, son port, ses docks, ses chantiers, sa poésie industrielle…
Depuis
que Nantes a choisi une technologie d’avenir : la construction d’éléphants
en bois sur le site des anciens chantiers navals, Saint-Nazaire, bêtement,
s’entête à construire des paquebots. Est-ce bien raisonnable ? Bricoler
des mouroirs flottants pour des vieillards bourrés de junk food à la Worcestershire
sauce, leurs gros culs gélatineux de retraités
yankees en shorts moulants assis sur des fonds de pension… Ces mêmes fonds de
pension à l’haleine fétide qui soufflent leur vent mauvais sur nos chantiers
navals, au profit de camps de travail forcé où des enfants finno-coréens sont
jetés vivants dans des cuves d’acier en fusion à bas prix, pour construire des
paquebots ahurissants de laideur qui viennent s’échouer sur les côtes
italiennes… Je ne peux que saluer la beauté du geste.
Et,
au nom de notre partenaire Costa Croisières, remercier les dizaines de
milliers… Enfin les milliers… pardon, les centaines d’ouvriers nazairiens (et parfois
polonais) qui continuent de construire ici ces mégamachins flottants, dont
l’utilité pour l’espèce humaine reste à démontrer, mais, et ce n’est pas le
moindre avantage, font pâlir d’envie Jean Blaise et son petit poussin géant. Quelle
ville peut en dire autant ?