De la domination du monde.

Publié le 13 mars 2014 par Feuilly

Diviser pour régner, telle était la devise des Romains. La longévité de leur empire prouve à suffisance à quel point cette formule a été efficace. Quant au vieux Caton, il terminait toutes ses interventions devant le Sénat par « Carthago delenda est » (Carthage doit être détruite), avec un bel emploi de l’adjectif verbal à nuance d’obligation. En d’autres termes, il prônait une politique préventive qui consistait à ruiner les cités qui auraient pu, un jour,  porter de l’ombre à Rome.

L’empire romain a fini par s’écrouler, mais il a imprégné notre culture. La preuve en est que ces interventions préventives et cet art de diviser pour régner sont des tactiques toujours bien actuelles.

Les Etats-Unis, depuis la disparition de l’URSS, cherchent à affaiblir leur vieil ennemi, la Russie, en tentant de grignoter ses anciennes provinces du sud  (Géorgie, Kirghizistan, etc.) et en étant présents militairement en Afghanistan. Tout cela après avoir demandé à l’Union européenne d’étendre sa frontière à l‘est et d’englober les anciens pays qui dépendaient de Moscou (Pologne, Allemagne de l’Est, Roumanie, Hongrie, Bulgarie, etc.). Ce fut relativement facile, sauf pour la Yougoslavie, dont le noyau dur, la Serbie, voulait rester fidèle à Moscou. On sait comment cela s’est terminé. On a inventé le droit d’ingérence humanitaire, on a parlé des droits de l’homme, puis l’Otan est allé bombarder Belgrade. L’affaire était résolue.

Ce qui se passe actuellement en Ukraine est évidemment la suite logique de cette politique qui vise à affaiblir l’ennemi héréditaire. Les droits de l »homme n’ont évidemment rien à voir là-dedans. La preuve, c’est que l’Occident s’est appuyé sur des fascistes possédant des milices paramilitaires pour s’emparer du pouvoir par traitrise (ne parlons pas des massacres soi-disant perpétrés par l ‘ancien régime, on sait aujourd’hui que les tireurs d’élite postés sur les toits tiraient indifféremment sur les manifestants et sur les policiers, afin de dresser tout le monde contre tout le monde).

Israël, de son côté, est resté lui aussi fidèle à la politique romaine et il s’y entend pour diviser ses ennemis. Mais il fait mieux, car là où les Romains allaient combattre eux-mêmes, Israël envoie les Etats-Unis (et ses valets européens) à sa place. D’où les guerres d’Irak, de Libye, de Syrie (et demain d’Iran). Tous ces grands pays arabes développés, disposant d’une armée puissante, auraient pu, s’ils s’étaient unis, provoquer de graves dégâts en Israël. On les a donc affaiblis les uns après les autres, obtenant à chaque fois l’accord tacite des pays arabes qui n’étaient pas eux-mêmes attaqués.  Et une fois le régime renversé, on s’arrange encore pour que la population se déchire, comme on le voit tous les jours en Irak, où les attentats font entre 30 et 50 morts tous les jours. Le comble du raffinement, c’est que ce sont les Arabes qui se tuent entre eux, ce qui doit faire rire du côté de Jérusalem. En Syrie, c’est exactement la même chose qui se passe : on a dressé les Sunnites contre les Chiites et les Alaouites, on a excité quelques milices terroristes et sanguinaires, et le tour est joué.

Tout cela avec la bénédiction de l’Arabie, qui se croit intouchable avec son pétrole et ses dollars et qui s’imagine à son tour utiliser l’Occident pour affaiblir les autres puissances arabes (et parvenir ainsi à imposer un jour sa conception rétrograde de l’Islam). Pourtant, qu’elle prenne garde, car elle pourrait bien être la dernière victime d’une longue série.

Bref, ce que je ne comprends pas, dans cette affaire, c’est l’inconséquence des populations arabes qui se déchirent entre elles pour le plus grand profit de leur vieil ennemi Israël, alors que si elles s’étaient unies quand il en était encore temps, elles auraient constitué une force pour le moins dissuasive. Il est vrai que l’Occident n’a pas oublié le panarabisme de Nasser.