Mon Miroir

Publié le 13 mars 2014 par Gentlemanw

Molle, je suis sortie de mon lit quasi semblable à un ectoplasme tout droit provenant d'une lointaine planète alien, pour glisser, ramper sous la douche. Trop froide d'abord car ma tentacule, ma main n'avait pas réussi à régler le bon équilibre des degrés, tout en chopant un savon gras pour ré-hydrater ma peau. Trop chaude quand mon cerveau enfin c'est décidé à ressentir la chaleur excessive pour le transmettre en tous sens vers mes bras, vers mon corps, vers un espace de décision, totalement embrumé, non par la vapeur mais par les médicaments.


Disloquée, flasque je suis revenue vers ma chambre, traversant le salon vide, triste, avec quelques rayons de soleil au-dessus d'une brume de printemps ou de pollution, je n'avais pas encore mes lunettes pour le distinguer. Sans trop de lumières, j'ai ouvert mon armoire, poussé des piles de vêtements, sans envie, sans choix précis, sans aucune idée d'ailleurs de ce que je vais mettre. Mon corps s'est éloigné de mon esprit, qui lui-même a sombré dans un nuage ouaté et incertain. 

Commode pour les sous-vêtements, une culotte, un soutien-gorge, un ensemble blanc ou un dépareillé de couleurs, une interrogation, un vide, pas de réponse. Je suis resté sans voix, sans émotion, sans envie, sans savoir pourquoi même je m'habillais. La journée, le temps, tout cela m'échappe depuis plusieurs jours, plusieurs semaines, sans pouvoir l'expliquer aux autres. Je me vide de mes émotions, non  par ma rupture avec cet homme mais par cette fissure qui continue à s'ouvrir entre moi et mon être. Je ne sais plus qui je suis, où je vais, pourquoi je me fuis, tout en souhaitant très fort redevenir en moi, intégralement. Je me suis désappropriée mon corps et mon âme flotte seule.


Les amies deviennent rares, car je saute des moments un peu euphoriques aux instants pathétiques de vide, comme un trou noir qui aspire tout autour de moi, sans rien soudainement. Alors l'image qu'avait les autres de moi, la jeunefemme déterminée, la toujours élégante sans faille, la jeune cadre respectée dans un millieu très business, tout s'est évaporé. Ils restent avec le bon côté des choses, s'occupent de leurs vies, m'oublient ou n'osent pas.

Un legging noir, très opaque, un pull noir très long en laine, quasiment une tunique, je me love dedans, une paire de chaussettes, j'ai froid là maintenant. Des colliers dans une boîte, ma main hésite, mon regard échappe au miroir. Un thé chaud, un bol de fromage blanc light, des médicaments, un jus d'orange sans goût, j'ai perdu le moindre plaisir, mais je ne ressens rien réellement, dans ce cocon médicamenteux. Lire me fatigue, dormir m'ennuie, ne rien faire me fait rager, mais faire m'épuise. Je me roule dans le canapé, des papiers administratifs à régler, des gens sourds à ma situation, la solidarité qui doit avoir couler de la table du salon vers le sol, pour disparaître dans les recoins de mon petit univers. Crier peut-être, mais aucun son ne sortira.

Je pleure, je me sens seule, les larmes sont sèches, je me bats contre moi, sans force, mais avec énergie, sans savoir quand je pourrai redevenir moi, sans pouvoir l'expliquer. Avec mon stylo favori, j'écris, encore des mots, pour un jour comprendre.

Nylonement