J'avoue avoir choisi ce livre un peu au pif. Alors qu'elle joue d'habitude un rôle très secondaire (voire totalement négligeable) dans le choix d'une lecture, c'est la couverture du roman qui a attiré mon œil. Cette photo de famille mi-bourgeoise mi-bestiaire annonçait quelque chose de totalement barré et je dois dire, après lecture, qu'elle reflète bien l'ambiance du roman : un truc carrément loufoque et sans queue ni tête, marrant au début, mais qui fait pschitt à la fin.
M. et Mme Fang sont des artistes. Pas des peintres ou des photographes, non, de vrais artistes. Ils pratiquent le seul art qui ait une valeur à leurs yeux : le happening dans les lieux publics. Font partie intégrante de leur oeuvre A et B, leurs enfants, alias Annie et Buster, qui accomplissent malgré eux les actions les plus stupides qu'ils aient jamais imaginé. Alors, quand leur vient l'âge de voler de leurs propres ailes, ils fuient le domicile parental pour embrasser une carrière artistique plus "sage", en tant qu'actrice pour Annie, écrivain pour Buster... avec un succès tout relatif.
Quel genre d'adulte devient-on quand on a été forcé par ses parents, durant toute son enfance, à réaliser les choses les plus absurdes au nom de l'art ? Demandez donc à Annie et Buster ! Asociaux et complètement paumés, ils ont quelques difficultés à s’accommoder du monde extérieur, et cela donne lieu à des situations assez drôles. La construction du récit alterne entre les souvenirs d'A et B, lorsqu'ils participaient aux happenings de leurs parents, et leur vie actuelle, sombres flots dans lesquels ils se démènent tant bien que mal pour trouver leur place. Derrière le texte, on sent poindre une réflexion sur l'héritage familial et la relation parent-enfant destructrice :
Le luxe d'une famille n'est pas garanti aux enfants. [...] Quiconque n'est pas en mesure de se conformer aux cadres fixés pour son existence perd toute prétention aux titres de fils et de fille. (page 430)
L'idée est bonne et le roman est plein de potentiel. Malheureusement, le rythme est lent, trop lent et l'intrigue piétine assez rapidement pour finalement retomber comme un soufflé : à la moitié du livre, j'avais perdu tout intérêt pour ce récit et mon ennui était mortel. Malgré une riche idée de départ, La famille Fang manque, pour moi, cruellement de piment.
La famille Fang de Kevin Wilson, Pocket, 2014, 436 pages