Magazine Journal intime

Thomas Desrosiers, 1913-2014

Publié le 20 mars 2014 par Lawrence Desrosiers
Papa vient de nous quitter à l’âge vénérable de 100 ans, quatre mois moins un jour.
Voici le texte que j’ai écrit et lu lors de ses funérailles.
Papa
Ce texte est écrit au présent, papa l’étant toujours dans nos cœurs.
Un adage dit qu’on ne mesure pas l’homme à sa grandeur physique. Dans le cas de Papa, c’est vrai. Il n’est pas très grand, mais comme il se plaît à le dire, on ne mesure pas l’intelligence d’un homme à sa grandeur.
Physiquement, il est beau garçon. Il a des yeux bleu profond, des cheveux noirs de jais, le look d’un acteur. Il est fier et toujours bien mis.
Humoriste et joueur de tours, il est avant-gardiste, cultivé et curieux. Il aime la lecture, suit de près la politique et est au fait de ce qui se passe dans le monde.
Il écoute Dalida, Nat King Cole et Bing Crosby.
Il est autodidacte. Il construit sa maison, apprend l’ébénisterie, crée et produit.
Ce n’est pas un rêveur. Il invente pour régler des problèmes, les pieds bien ancrés dans la réalité.
Il est vaillant, courageux et généreux, des qualités propres à nos pères bâtisseurs. Il part au loin pour gagner sa vie et celle de sa famille. Il fait la drave et le dynamitage sur les rivières de la Côte-Nord. Il a construit des maisons partout sur la Côte, jusqu’à Goose Bay au Labrador. Il a failli perdre la vie, trop loin en forêt pour être évacué à temps. Il a aussi eu une hernie discale qui l’a cloué sur un lit à l’hôpital. Aussitôt guéri, il est reparti travailler, afin que sa famille ne manque de rien.
Nous avons passé plusieurs Noëls sans lui. Nous l’imaginions dans la chanson « Noël au camp » de Tex Lecor. Certaines années, l’avion de la compagnie Matane Air Service transporte vers nous le plus beau des cadeaux, notre Père. Lorsqu’il arrive, il nous berce, nous cajole. Le moment venu de repartir, la tristesse remplit la maison.
Papa et maman sont de grands amoureux. Lors de ses périodes d’éloignement, nos parents s’écrivent de longues lettres. Maman nous lit les passages qui nous concernent. Il y a de bons mots pour chacun d’entre nous. Puis, il y a le silence. Maman sanglote. Les mots d’amour de papa pour elle lui crèvent le cœur, elle s’ennuie à mourir de son amoureux.
Notre père, ce centenaire
Comme un arbre, il a vécu 100 ans. Ses racines sont profondes. Il se tient droit.
Très jeune, il travaille fort. Il bûche et laboure sur la terre familiale. Le reste de sa vie, il construit, bâtit, érige, échafaude et répare. Son esprit est présent, son humour étonnant. Il témoigne de son vécu avec une mémoire phénoménale. Cent ans sur la terre, pour observer ce qui s’y déroule… Né au moment de la Grande Guerre de 14-18, témoin de la Seconde Guerre mondiale, excité par l’aventure de Neil Armstrong, il est toujours vivant en cette époque de Google Earth, de l’iPhone et du iPad.
Papa est l’arbre sur lequel ses enfants ont gravé un cœur, le symbole de leur amour réciproque.
Ses enfants, Rachel, Gaétane, Gérald et Lawrence
Thomas Desrosiers, 1913-2014

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