Le chien tranquille

Publié le 23 mars 2014 par Stella

Pas plus tard qu'hier, en fin d'après-midi, je descendais la rue commerçante non loin de chez moi, rue Mouffetard pour ne pas la nommer (comme on dit !), avec mon cabas pour faire quelques courses et acheter des fleurs. Il y avait du monde, pas énormément, mais comme un samedi, au moment où l'on fait les dernières petites emplettes pour pouvoir recevoir les amis au dîner : la queue chez le boulanger, des nez renifleurs à la poissonnerie, une dizaine de carnivores à la boucherie bref, suffisamment d'affluence pour que l'on avance peut-être pas à grand peine, mais assez lentement dans cette rue étroite et toujours encombrée par les étals qui débordent des boutiques.

Peu après le marchand de légumes, il y a un bistrot. Un vieux bistrot remis au goût du jour par le patron - le même depuis des lustres et qui, par un curieux hasard, est un très ancien copain d'un membre de ma famille. Il attire les intellos du quartiers, amateurs de vins, d'art (photos et tableaux) et de bons coins mais pas trop tranquilles. Il n'y a en effet que quatre tables mais fort visibles dehors, serrées collées le long de la façade, sur le maigre trottoir censé protéger le piéton d'une chaussée supposément boueuse.

Qui était, hier après-midi, attablé à cette simili-terrasse ? Je l'ignore... mais toujours est-il que l'un ou l'une des personnes présentes avait un chien. Un animal relativement grand, du genre setter anglais : blanc tacheté de noir, une longue queue et des poils soyeux. Etait-il fatigué ? S'ennuyait-il ? Il avait en tout cas décidé de piquer un petit roupillon et, le trottoir sus-mentionné ne lui convenant pas, il s'était tranquillement installé très exactement au milieu de la rue. Couché en rond, sa tête convenablement installée sur l'une de ses pattes repliées, la paupière papillonnante de l'individu que le sommeil gagne irrésistiblement, il était totalement insensible à son étrange environnement. Le plus extraordinaire, finalement, était que chaque personne, montante ou avalante, prenait grand soin de le contourner, de l'éviter même de façon à ne pas le réveiller. Les poussettes faisaient un détour, les enfants le regardaient sans oser le toucher... un presque sens giratoire s'installait autour de lui de façon naturelle. J'ai regretté de n'avoir pas mon téléphone portable avec moi, j'aurais pris une photo de cette scène éphémère et étonnante, qui témoigne d'une certaine forme de tranquillité de ce quartier que le tourisme n'a pas encore gagné et que les bobos continuent à épargner, quoi que...