Mon cher Victor,
Vendredi après-midi, heure de la récréation. J'ai lâché mes fauves dans la cour, sauf un. Ah ? Un puni ? Non. Je lui ai juste passé un savon monumental. Qu'avait fait le garnement ? Pas grand chose : il étranglait un de ses camarades. Mon dieu... Tu plaisantes, j'espère, Mirabelle ? Même pas. Monsieur Jérôme n'avait trouvé rien de mieux que d'attraper le cou d'Antonin. Mon dieu... Alors j'ai attrapé le fautif par le col et l'ai fait asseoir dans le couloir, tout en autorisant aux autres d'aller en récréation, sans quoi j'aurais eu droit à un attroupement du style :"Qu'est-ce qu'il a fait, maîtreeeesse ?", "Qu'est-ce qu'il y a, Jérôme ?", "Pourquoi elle t'a puni la maîtresse ?", "Eeeeeh, maîtresse, pourquoi il a pas le droit de descendre avec noooous, Jérôôme ?".
Après m'être assurée que tous les autres CE1 étaient descendus (avec un adulte pour les surveiller dans la cour, évidemment...), je retrouve le petit Jérôme, assailli par les questions de CM2 qui passaient par là. Je précise à ces derniers que ce qui se passe ne les concerne en rien et leur conseille de passer leur chemin. C'est là que je sermonne vertement l'inconscient, qui, soudain, se met à pleurer à chaudes larmes : "Mais c'était pour jouer...". Argl. Ca y est... Ma carrière à peine commencée, je fais pleurer les enfants... Ceci dit, tu as bien fait de ne pas laisser passer une chose pareille, Mirabelle... En CE1, étrangler un camarade, même pour jouer... Non, non, tu as bien fait ! C'est ce que je me suis dit aussi, surtout quand on a en tête des exemples tels que le jeu du foulard, auquel nous ne sommes pas du tout sensibilisés à l'IUFM (aaaah, la formation à l'IUFM, j'en ai des choses à dire là-dessus !) et à l'égard desquels il faut pourtant être très vigilent ! C'est pourquoi j'ai précisé à Jérôme qu'un accident était bien vite arrivé et qu'il ne fallait pas avoir ce genre de jeu, même avec un élève consentant.
C'est alors que je me suis aperçue que les CM2 étaient en fait restés dans le couloir à observer la scène. Et l'un d'eux, dans un chuchotement, fit remarquer à son acolyte :"Dis donc, elle a l'air très très sévère...".
Argl.