Aujourd’hui j’ai participé à la grande manifestation du 1er mai à Moscou. Un très grand meeting des partis de gauche.
Edouard Limonov à la tribune
La situation en Russie n’est pas tellement rose comme peuvent l’imaginer les cercles progressistes en France. De nombreuses usines sont arrêtées, les kolkhozes démantelés et des champs sont en friche. En 1990, 40% du flotte mondiale des avions civils étaient de fabrication made in URSS. Maintenant, le chiffre est proche de zéro. La corruption dépasse largement celle de France, fait de l’oligarchie. A Moscou, il n’existe plus de petites gargotes bon marché, à l’exemple de celles qui grouillent à Paris. Les statistiques économiques sont probablement falsifiées. Il faut être Russe pour entendre les damnations des populations contre le pouvoir central. Mais les prix du pétrole pendant le temps de Poutine ont augmenté à six reprise et ça peut donner quelques sensations de prospérité. Mais maintenant les prix du pétrole sont devenus stables et le «miracle russe» à disparu. Mais, paradoxalement, c’est ne pas le dossier social en décrépitude, qui menace de bouleverser la stabilité en Russie, mais le dossier ukrainien. Pour les Russes, c’est plus une question d’honneur, plus importante que le pain.
Tous les partis du gauche de Russie sont interdits. Le pouvoir indique «qu’ils n’ont pas encore réussi à mettre sur pied le processus légal de leur enregistrement». Ils ne réussiront jamais et, tout le monde le sait. Une seule exception, c’est le Parti communiste de Ziouganov, qui a sombré dans le marasme et maintenu tel quel par le pouvoir russe qui le finace en partie.
Rien d’étonnant que la "colonne de gauche", la vraie, lors de cette manifestation, qui est passée devant le monument de Timiriasev à Moscou, était composée d’une demi-douzaine de partis avec les drapeaux rouges et, tous ces partis étaient, soit interdits, soit «pas enregistrés». Ils sont néamoins tolérés lors de la manifestation du 1 mai. Parmi eux, –l’"Autre Russie", qui fait du dossier ukrainien son fer de lance, sa propagande, en négligeant même les questions sociales avec ce slogan: «aider les insurgés de l’Est de l’Ukraine!».
Pour information, à propos de l’Ukraine, à part la lute contre la junte de Kiev, l’autre principale revendication des insurgés est la nationalisation de toutes industries, «privatisés par les bandits ukrainiens», comme ils disent. Actuellement, contrairement à ce que prétendent les médias occidentaux, Vladimir Poutine est en plein doute. Va-t-il apporter son aide aux insurgés ? Il hésite. D’ailleurs, s’il y a contamination des nationalisations en Ukraine, est-ce la Russie échappera à son tour ? Est-ce que les privatisations en Russie étaient plus sympathiques qu’en Ukraine ? Des privatisations sans bandits à col blanc ?
La "colonne de gauche" à Moscou n’avait que quelques milliers de personnes ? Comme a dit un des orateurs venu de Kramatorsk : «Nous avons fait l’assaut de la mairie du Kramatorsk avec une foule bien moindre».
Alexandre Sivov