J'allais me faire une tisane, mais une tisane, je devais me "la faire", alors que le vin australien était là, tout frais, parfumé de prune et de mûre avec un soupçon de poivre sur une trame tannique souple aux notes subtiles de chêne. Excellent avec du steak grillé, une pizza ou un plat de pâtes à base de tomates.
Avec des cocos de pâques au chocolat aussi.
Quand on dort l'après-midi, ou de 11h à 16h30 disons, on se soustrait du trafic quotidien. Ceux qui font des siestes, savent le bonheur réparateur que peut procurer une telle habitude de sommeil de jour, mais il désoriente aussi. "sommes-nous demain? d'où j'arrive moi? Qu'est-ce que tu fais là toi ma puce, il n'est pas tard?" "Papaaaaaa! Il est 17h!".
Merde. Il était bien 17h. Fallait que je la fasse manger et hop! le cours de danse!
C'était un jour important, le jour du premier match de la série Canadiens/Boston.
Larry Robinson disait avec beaucoup finesse que le hockey était 80% d'ordre mental et le 20% restant se passait dans la tête. Larry était d'une classe à part. Je me rappelle un moment surréaliste où lors d'un match contre Toronto, l'arbitre, qui venait de donner un 10 minutes de mauvaise conduite à Dave "Tiger" Williams avait vu celui-ci jeter automatiquement les gants dans le but de se battre...avec l'arbitre...Robinson s'était tout de suite interposé, Robinson un géant défenseur de l'équipe adverse tout de même, et avait saisis Williams par le collet, sans jeter les gants, non pas dans le but de protéger l'arbitre (peut-être aussi) mais dans le but de raisonner le joueur des Leafs. On le voit lui dire "Don't do this man, you'll regret it" et des choses du genre. Il y a bien deux ou trois coéquipiers de Williams qui se rapprochent, pour faire la même chose, mais celui qui trône en "boss" comme dirait mon fils, c'est le grand gilet rouge, Larry Robinson au milieu du groupe de joueurs. La grande classe. Williams, agité, l'écoute attentivement et finit par abandonner son cirque.
Les Canadiens de l'époque, les années 70, étaient non seulement meilleurs que les autres clubs (8 petites défaites en 80 matchs en 1977! 29 sur trois ans!) mais ils se servaient aussi beaucoup plus de leur intelligence. Il faut lire le brillant livre de Ken Dryden sur sa carrière, The Game, pour comprendre l'accès privilégié et unique auquel il nous invite. Pour comprendre ce qui fait de grands athlètes, aussi de grands hommes quelques fois.
La série Montréal-Boston est la 34ème entre les deux clubs. Montréal a eu le meilleur sur Boston presque toute les fois sauf 8. Depuis la fin des années 80, le milieu des années 90, mais surtout depuis quatre ou cinq ans, l'avantage tourne à l'avantage un peu plus en faveur des Bruins. Ils ont un club redoutable, principalement axé sur la robustesse, les coups salauds et les gestes vicieux. Rien de très intelligent. Et avant le tout premier match, je savais que Montréal menait déjà, au minimum 1-0.
Pourquoi? Parce que leur technique pour faire perdre la tête aux Canadiens aura été nulle. Elle fût de dire que "moi, les Canadiens, ça fait 7 ans que je joue contre, je les déteste", Milan Lucic, 25 ans. Ou encore "Avant j'étais instructeur des Canadiens et j'avais appris à haïr Boston, maintenant que je coach Boston, je déteste Montréal", Claude Julien, 54 ans.
Quand la question a été transposée dans le vestiaire des Canadiens, Carey Price, 27 ans, a tout simplement dit "de la haine? C'est un peu fort non? Animé par la compétition contre eux? oui, mais pas de la haine, ce n,est pas tellement gentil de leur part", l'assurance de la sagesse paternelle affichée au coin du sourire. Michel Therrien, 51 ans, instructeur des Canadiens, a évité la question en disant : " Nous allons nous concentrer sur nous, non pas sur eux.". Boss.
On dit que Boston est une équipe de sauvages mais durant cette saison, où ils ont terminé au sommet, comme la meilleure des 30 équipes de la ligue, ils ont obtenu une moyenne de 10,8 minutes de pénalités contre 12,7 pour les Canadiens. Montréal a donc été plus indiscipliné cette année, quoi qu'on en pense. Toutefois, le mental encore, quand Boston a joué contre Montréal, ils ont obtenu une moyenne de 13,1 minutes de pénalités par match contre 11,3 pour Montréal. Montréal a gagné 3 des 4 matchs qu'ils ont joué contre eux cette année en saison régulière.
Avant le match, un spécialiste avisé et non raciste, (Ce qui élimine et Don Cherry et Ron MacLean) sur les ondes de CBC, le même d'ailleurs qui avait confronté (avec P.J.Stock) Ron MacLean sur ses propos racistes à l'égard des arbitres Québécois, a souligné que dans la première série, Montréal avait passé 10 minutes de plus sur l'avantage numérique qu'en punitions. Pour Boston c'était le contraire. Et que ça pourrait bien faire la différence. C'est exactement ce qui a fait la différence. 2 buts en avantage numérique, dont le gagnant en deuxième période supplémentaire et une performance fabuleuse du gardien de but (Price), combiné à des tonnes d'occasions manquées dans l'énervement par une équipe meilleure à tous les niveaux, a donné la victoire du premier match à Montréal.
Et l'intelligence.
Tout le match, on a eu droit aux habituels coups de poings impunis de l'adversaire, aux charges multipliées des joueurs jaunes et noirs, aux tentatives d'hameçonnage de la part de quelques rats qui souhaitaient provoquer les talents Montréalais, à de l'obstruction et à des joueurs qui prolongent leur 6 pieds 9 sur nos 5 pieds 8 au sol afin de les tenir à l'écart du jeu le plus longtemps possible de manière obstrusive.
Jamais Montréal n'a mordu à l'appât.
Comme je travaillais la nuit même, comme les ouvre-bouteille électrique ne sont jamais dans le chemin de l'ivrogne qui veut entamer un bouteille, je me suis endormi longtemps avant la fin.
Jusqu'au cri de Hyène entendu dans la nuit. Un père reconnaîtrait son fils parmi des milliers, mais je savais que ce cri n'en était pas un d'angoisse. Il n'a pas hésité à me sortir du coma pour me dire:
"papa...je sais que tu travailles dans 2 heures mais P.K.Subban. P.K.Subban, P.K.Subban..."
Il n'a pas eu besoin de mettre de verbe, j'avais compris.
J'ai foncé vers la télé m'enfargeant dans mes orteils pas encore dépliées deux fois, et j'ai tout juste eu le temps de voir Desharnais gagner la mise au jeu, Markov refiler la rondelle à P.K. et P.K. marquer (en reprise). Et j'ai vu la réaction de P.K. après le but. Mesurée. Presque posée. Grandiose. Les deux bras simplement ouverts comme Jésus trônant sur Rio.
Huez-moi, fans de Boston.
Tristes morons.
Ils a répondu, le public a massivement lancé des objets sur la glace.
Quand on joue dans une dompe, il faut s'attendre à nager dans les cochonneries.
Ils sont ensuite allés sur le net pour casser du "nigger". Ça semble être un sport en soi aux États-Unis depuis quelque temps.
Édifiant.
Faudrait leur mettre Jarome Iginla et Malcolm Subban (le frère de celui qu'ils huent), deux de leurs joueurs, noirs, sur écran géant à ses idiots pour leur apprendre le civisme.
Du vendredi au samedi midi, tout n'était que lent décompte vers le second match entre les deux clubs. Toujours à Boston. Les Bruins tiraient de l'arrière 3-1 en troisième mais ont montré pourquoi ils ont terminé premier de la ligue et ont remis les pendules à l'heure. Ils ont eu le meilleur sur Montréal.
Jusqu'à la prochaine guerre.
Boss c'est peut-être pour Boston...
AUBERGISTE! Je veux du rouge!