Sans revenir aux thèses de Jacques Ellul sur le sujet, deux études récentes viennent étayer cette hypothèse.
La première, menée par la psychologue Linda A. Henkel et publiée dans Psychological Science, visait à comprendre l’influence de la prise de photos sur la mémorisation des objets photographiés : est-ce que photographier un tableau dans un musée renforce ou diminue le souvenir qu’on en conserve ?
Pour vérifier cette hypothèse, les participants à l’expérience se voyaient proposer la visite d’un musée à travers deux actions distinctes : prendre en photo certaines œuvres et en observer d’autres. Les résultats sont les suivants : les participants ayant pris des photos conservent moins de souvenirs des œuvres que ceux ayant simplement observées celles-ci. Dit autrement, se reposer sur la mémoire de l’appareil altère en quelque sorte sa propre mémoire. A bon entendeur à tous ceux qui ne peuvent plus voir un concert, une expo ou un panorama autrement que par l’intermédiation d’un objectif.
La secondeétude, menée par deux chercheurs américains, essaye quant à elle d’en savoir plus sur les conséquences de la prise croissante de notes – voir la retranscription in-extenso des paroles du prof, par les étudiants via clavier plutôt qu’avec un stylo. Le fait de prendre plus de notes est-il une garantie d’efficacité ?
Bien que les enseignants soient partagés sur la question, l’étude en question (et relatée par le Monde du 29 mai) tend à prouver que la prise de notes manuelle est plus efficace en termes d’apprentissage que la prise de notes sur ordinateur. Les auteurs écrivent ainsi « L’utilisation d’ordinateurs en classe doit être examinée avec une salutaire dose de prudence. En dépit de leur popularité croissante en ces lieux, les ordinateurs pourraient faire plus de mal que de bien ».
Qu’en penser à l’heure où l’informatisation de l’école (avec force lobbying forcément désintéressé en coulisses) est présentée comme la nouvelle panacée éducative ?
Peut-être juste rappeler que les pontes informatiques de la Sillicon Valley envoient leurs enfants dans des écoles où il n’y a pas la moindre trace d’un écran et où il est recommandé aux parents, comme à la Waldorf School of Peninsula, de limiter l’exposition aux écrans jusqu’à l’équivalent de la sixième… Et alors même que 45 Etats Américains sont en voie de supprimer l’apprentissage de l’écriture cursive à l’école élémentaire. C’est vrai ça, c’est tellement plus simple de rédiger ses devoirs sur un ordinateur (tant que y’a de l’électricité).