Magazine Journal intime

Nue

Publié le 13 juin 2014 par Petitrien

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- Alex Kanevsky -

Je suis partie quelques jours sous le soleil du midi, à Fréjus, ça sentait bon le pin et la lumière. Il fallait remettre d’aplomb le jardin du mobilhome de famille qui avait pendant une absence de plus de huit mois un tantinet pris des libertés et manqué d’arrosage. Dans le Domaine du Pin de La Lègue, c’est le nom de l’endroit où pendant près de cinquante ans mes beaux-parents ont passé leurs vacances, on vit en communion directe avec la nature. Une sorte de vie à la Robinson Crusoé améliorée. On passe le plus clair de son temps dehors pour tout : la cuisine, la toilette, les repas, les courses, la sieste, la lecture, l’apéro, l’écriture, la conversation, le jardinage, la rêverie, il n’y a que la nuit qu’on entre à l’intérieur de la caravane pour se mettre dans un grand lit. Chaque fois que j’y ai passé quelques jours en tout petit comité, j’ai remarqué à quel point c’était bon de pouvoir être nue nue. Comme la douche est extérieure et qu’on est à l’abri des regards, protégé par une végétation généreuse, et que je sais que je suis plutôt seule, j’aime avoir ce contact avec l’air dans le plus simple appareil. Je ne saurais dire pourquoi ça me fait cet effet là, mais la sensation de bien-être est intense. Il fait soleil, chaud, une petite brise caresse ma peau, l’eau participe à cet étonnant moment de symbiose, je me sens débarrassée de tout, à l’état sauvage, tout me semble possible, tout me semble simple, tout me semble superflu sauf cette sensation intense d’existence.

J’ai été élevée dans la peur du corps. Ce n’était pas de la pudeur, c’était plutôt une grande méfiance, comme s’il y avait danger (et il y avait danger). La sensation de sa nudité était interdite, alors progressivement on oublie qu’elle existe, et on oublie d’en profiter… Chaque fois que je retrouve cette sensation, la peau en émoi, j’aime ça et je mesure le chemin parcouru. Je me sens libre, je me sens prête, je me sens humaine.

Je suis émue, nue.


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