C’est trop facile…

Publié le 16 juin 2014 par Legraoully @LeGraoullyOff

C’est trop facile de dire qu’on est fâché à mort avec quelqu’un qu’on a aimé quand on n’a pas su faire de concession pour garder son amitié : comme s’il n’y avait pas assez de malheurs ici-bas, il faut que nous y ajoutions notre stupide ressentiment causé par de dérisoires bagatelles.

C’est trop facile de disqualifier socialement untel sous prétexte qu’il aurait des goûts de chiotte, quand il est si facile pour quiconque de se laisser aller à la contemplation d’une œuvre médiocre : que celui qui n’a jamais versé des larmes en écoutant une chanson idiote me jette la première pierre.

C’est trop facile de traiter quelqu’un de minable parce qu’il a fait une erreur, comme si la norme ici-bas était d’afficher en toute circonstance l’aisance d’un super-héros : même Superman est gauche et maladroit, quand il n’est pas occupé à combattre le mal.

C’est trop facile de dire qu’on vit une époque de merde et d’en rejeter la faute sur les autres : nous sommes tous responsables du monde dans lequel nous vivons et tant qu’on n’est pas entre quatre planches, on n’a pas d’excuse pour ne rien faire pour que ça s’arrange.

C’est trop facile de prendre les anciens en otages et de s’en servir comme alibis pour justifier ce qui nous arrange : comme ils ne peuvent plus se défendre contre les professionnels de la récupération, on peut leur faire dire n’importe quoi en toute impunité.

C’est trop facile de se laisser aller au cynisme et au nihilisme et de dire que tout se vaut quand on n’a jamais connu la misère la plus extrême : s’il en arrive à dire que Hitler ou Mendès France c’est pareil, alors l’homme occidental est un enfant gâté qui est devenu aveugle.

C’est trop facile de crier au fascisme dès qu’un bouffon médiatique se fait critiquer comme il le mérite : la liberté, ça ne consiste pas à se laisser à ses plus bas instincts et surtout pas à la réclamer pour soi à l’exclusion de toute autre personne – c’est justement ça, le fascisme.

C’est trop facile de s’arroger le titre de « libre penseur » pour ensuite faire la leçon aux autres et leur reprocher de « passer à côté de la vie » : si quelqu’un est heureux avec son train de vie monacal, c’est son droit, on n’a pas à être aussi moralisateur que les curés qu’on prétend combattre.

C’est trop facile de refuser de combattre une grosse ordure sous prétexte que « ça va en faire un martyr » : il y a un an, en tuant Clément Méric, les fachos offraient un martyr sur un plateau à leurs adversaires, on ne peut pas dire que ça ait porté chance à ces derniers !

C’est trop facile d’accuser les gens de ne pas aimer leur pays quand soi-même on refuse de l’aimer : il y a ceux qui l’aiment tel qu’il est, ouvert, divers et varié, et ceux qui ne sont disposés à l’aimer que tel qu’ils le fantasment, fermé, uniforme et monochrome.

C’est trop facile de prendre la défense d’un salaud de première classe sous prétexte qu’il a du talent et / ou de la culture : utiliser de telles qualités pour défendre l’indéfendable, c’est comme utiliser la science pour fabriquer la bombe atomique, c’est dévoyer le génie humain.

C’est trop facile de cracher sur des travailleurs qui défendent leurs droits, quand on ne sait même pas pourquoi ils luttent et quand on n’a soi-même jamais rien fait d’autre que défendre les intérêts de ses maîtres : le collabo critique le résistant pour ne pas devoir avouer qu’il l’admire.

C’est trop facile de se plaindre de la violence, réelle ou supposée, d’un peuple, quand on a tout fait pour le pousser à bout : on ne vaut alors guère mieux qu’un gamin qui appuierait comme un dingue sur un ballon et pleurerait parce qu’il lui a éclaté à la figure.

C’est trop facile de critiquer un rédacteur quand on ne propose rien de meilleur : si cet article ne vous a pas plu, portez-vous donc volontaire pour grossir les rangs des rédacteurs du Graoully déchaîné, on verra bien si vous pouvez faire mieux que ça ! Non mais !