Qu’y a-t-il aujourd’hui de plus consensuel que la cérémonie des Oscars ? En effet si par le passé l’académie a pu récompenser des œuvres cinématographiques fortes, désormais c’est le film le plus évidemment « Oscarisable » qui remporte tout les suffrages. Cependant, personne n’a trouvé à redire devant le sacre des frères Coen en 2007 avec No country For Old Men (meilleur film et meilleur réalisateur). Le film a fait l’unanimité à peu près chez tout le monde.
Au départ il y a le roman de Cormac McCarthy, auteur culte américain pas franchement porté sur l’optimisme. Son œuvre traite de personnages isolés et obsédés par la mort, la filiation avec celle des frères Coen semble évidente. En tout cas No country For Old men vient à point nommé pour les deux frangins qui depuis quelques temps semblaient légèrement en perte de vitesse. Leur incursion dans la comédie pure a déçu. Des films comme Intolérable Cruauté ou Ladykiller, même si ils restent sympathique, ne sont clairement pas au niveau du reste de leur filmographie. Les Coen reviennent donc ici aux fondamentaux et No country For Old Men fait même beaucoup penser à « Sang pour Sang » leur premier film culte.
Transcendé par une mise en scène implacable, No country For Old Men a la puissance d’un classique instantané. Le terme de mise en scène prend ici tout son sens car les Coen s’amusent à jouer avec la perception du spectateur. En effet les scènes d’actions du film sont d’une lisibilité incroyable. La chasse à l’homme entre Josh Brolin (vétéran du Vietnam qui dérobe un magot appartenant à un cartel) et Javier Bardem (tueur psychopathe jouant le destin de ses victimes à pile ou face), donne lieu à des affrontements spectaculaires d’autan plus jouissifs qu’ils sont parfaitement orchestrés. Une gestion de l’espace peu commune qui permet aux frangins d’offrir de véritables moments de bravoure. A contrario, toutes les scènes servant à définir les liens entre les différents personnages et l’intrigue restent volontairement opaques. Les Coen ont toujours un train d’avance sur le spectateur et il faut plusieurs visions pour réellement comprendre les subtilités du scénario et l’enchainement des événements. Car finalement le pourquoi et le comment importe moins que la nécessité de survivre dans un monde de plus en plus hostile. Tout est dérisoire devant la mort. En cela on retrouve les obsessions métaphysiques de McCarthy.
Evidement le casting est parfait, Brolin se révèle un cowboy bien dans la norme et Barden semble ne pas s’être remis « capillairement » du film. Tommy Lee Jones dans un rôle de Marshal au visage fatigué porte à merveille tous les questionnements de ce grand film crépusculaire et c’est finalement lui qui a le dernier mot.