Quand je la rejoins, je m’arrange pour être en avance, et je me pose à la terrasse du café d’en bas. Pas celui que tout le quartier s’arrache, l’autre, le petit café sans prétentions, celui qu’on ne voit pas. Là, il m’arrive de lire, d’écrire parfois, et je l’attend en commandant un demi, c’est comme un sas entre mon monde et le sien, le temps d’être là pour elle, entièrement. Parfois je guète sa fenêtre du cinquième pour tenter de l’apercevoir, mais le plus souvent, je sais qu’elle va arriver par le métro et passer par le trottoir d’en face. Lorsque j’ai fini ma bière, je lui envoi un message pour lui dire que je suis à la terrasse du café d’en bas, elle me répond “Je le sais, je te vois, je descend”. J’ignore si elle me regarde depuis longtemps, peu importe, je commande deux verres de vin blanc et je me laisse doucement couler dans un nouveau monde, le notre.