En face de moi, mon amoureuse a le feu au cul, les seins qui explosent et deux merveilles accrochées à ses mamelles de reine. Mathilde me rend folle. Ca pue. Ca brûle. Incendie conjugal. J’attrape les deux petites, les pose dans leur couffin, prends le premier torchon à ma portée et tente d’étouffer tant bien que mal l’embrasement de notre intérieur. Je fouette la banquette moelleuse comme autrefois je fessais la chair tendre et ferme de ma salope. Mathilde ne dit rien, les seins ballotant en l’air, elle me regarde m’agiter. Les gosses dorment, shootées par leur dernière prise de lait. Le bateau coule, notre amour est touché, coulé, Mathilde reste impassible, princière. La réalité ne peut plus la toucher. Putain, ce sont les hormones qui lui ont retourné la tête ou est-ce la descente d’organe qui l’a anesthésiée ? Je continue à battre ce foutu canapé, à m’acharner sur lui, le feu s’est depuis longtemps éteint, Mathilde essaie de m’en empêcher, je vais défoncer cette banquette à coup de bavoirs. Elle crie, rien ne m’arrête. Elle s’approche de moi, se place entre moi et mon geste, son corps voluptueux contre le mien, petit et nerveux, elle tente de fuseler ma fureur. Je pourrais la frapper, un instant, nos regards se croisent. Je vois la peur dans ses iris noirs. Frayeur. Je m’effondre en pleurs sur la noirceur du canapé :
- Je suis désolée, je ne sais pas ce qui m’a prise.
Mathilde me console, s’assied à mes côtés, prend mes mains et les caresse.
- Ce n’est rien, on est toutes fatiguées.
- Je suis conne. Vraiment conne.
- Non, c’est moi. J’ai réagi comme une gamine. Qui préférerait se jeter par la fenêtre plutôt que se faire griller par ses parents en train de fumer une cigarette.
Et elle rit dévoilant ses charmantes petites canines. Elle est toujours si drôle. J’ai honte. C’est elle qui s’est tapée les piqûres tous les jours pour la FIV, les hormones qui chamboulent le corps, la grossesse anxieuse, la moitié du temps allongée, l’accouchement prématuré et moi, je suis toujours là, à côté, impuissante et coupable. Enervée parce que celles que nous avons tant désiré à deux accaparent totalement ma meuf. Il faut que je libère ma femme. Alors, c’est peut-être le moment le plus mal choisi mais je lui dis :
- J’ai trouvé un babysitter.
- Non, c’est vrai ! C’est génial, comment as-tu fait ?
Mathilde se redresse, retrouve sa vivacité, elle a toujours ses gros seins à l’air. J’adore. Elle est belle. Je ne rentre pas dans les détails. Mathilde voulait à tout prix un mec pour garder les filles. Son caprice. C’était la seule condition, la condition absolue pour qu’elle daigne bien reprendre son travail. Anouk et Mariette auraient besoin d’un référent mâle à la maison. Mathilde est une ancienne hétéro, elle a parfois des idées un peu conservatrices. J’ai eu beau lui dire que des référents mâles, ce n’était pas ce qui manquait, entre LE gynéco, LE pédiatre et NOS deux pères. Qu’elle cautionnait l’économie nucléaire familiale de droite avec la présence obligatoire d’un mâle et d’une femelle pour le bonheur de l’enfant. Rien à branler. J’aurais pu labourer en long et large tout le champ de recherches des études du genre, Mathilde voulait UN assistant Paternel. Mais allez-y pour trouver un nounou ! L’opération était impossible. Si les femmes progressent et conquièrent des territoires autrefois réservés aux détenteurs de bite, les mecs n’ont aucune envie de régresser et retourner dans le giron des mères. Bref, depuis trois mois, je cherchais. En vain. J’avais fait le tour des mairies, des crèches, des centres d’aides à la petite enfance, des réseaux sociaux de parents. Rien de rien. Le Harry Poppins mâle était rare et objet convoité. Quasiment introuvable sur la marché. Aussitôt mis, aussitôt arraché. Et puis, il y a deux jours, j’étais tombé sur l’annonce d’un crevard. Le mec avait une gueule d’ancien terroriste, sa présentation était des plus douteuses, maniant la dérision et l’humour noir, ce qui n’est pas de très bon ton pour les jeunes parents anxieux… mais, mais il était disponible. Personne ne l’avait encore liké ni même écrit (forcément). Je comprends, on pouvait soupçonner le pédophile. L’occasion était trop belle. Je lui ai répondu d’un ton pète sec. Au mieux, ce n’était qu’un foutage de gueule, le type ne me ferait pas signe. Au pire, on le rencontrerait, il ferait l’essai, que j’imaginais déjà catastrophique, et nous ne tarderions pas à le virer. Ca valait le coup d’essayer. Contre toute attente, il m’avait répondu, ce n’était donc pas une blague.
- Super, il est comment ?
- Je ne sais pas, je ne l’ai qu’une fois au téléphone. Il a une bonne voix (objectif : rassurer Mathilde). Il a un léger accent. Je crois qu’il a des origines écossaises…
- Ah super, il parlera anglais aux filles. Ca sera un peu notre jeune fils au pair, non ?
Je préfère ne pas la contredire, ça se voit qu’elle n’a pas encore vu sa photo.
- Bon, on le rencontre quand ?
- Mardi prochain, à 10h. Je lui ai donné rendez-vous chez Jojo en bas, place d’Aligre.
Mathilde rayonne, elle m’embrasse et me prend sur le canapé. Oh oui ! Les petites sont endormies.