Je ne vous apprendrai rien en vous disant que j’ai changé de matelas récemment, rien de mes aventures en chambre ne vous est inconnu. D’un rien je m’amuse, de peu je fais un billet pour mon blog, les livreurs en général me font rire, ces livreurs de matelas seront le sujet du billet du jour.
Les années passent, les livreurs ne changent pas. Ceux qui m’ont apporté mon nouveau matelas ressemblaient comme deux gouttes d’eau à ceux qui en firent autant, il y a une quinzaine années, pour mon ancienne literie.
Objet lourd et encombrant, ils viennent à deux et c’est très compréhensible. Un vieux et un jeune, un Blanc et un Black, un qui rouscaille en permanence et l’autre rigolard. Dois-je préciser que le « chef », c’est le Blanc, celui qui est vieux et qui râle ? Le même tandem que celui qu’on voit dans les polars à la télévision ou mieux encore, entre deux numéros au cirque d’Hiver.
Ca a commencé par un appel téléphonique, le vieux rouspétait parce qu’il ne trouvait pas mon immeuble et ensuite que ma porte d’entrée était bien trop loin de l’endroit où il s’était garé. De ma fenêtre, je les ai vus approcher, j’entendais même le type tempêter tant et plus que sa charge était trop lourde. Je me suis bien gardé de lui faire remarquer que je trouvais étrange qu’il soit seul à porter mon matelas sur son dos, vu qu’ils étaient venus à deux et que l’autre suivait en se marrant… Comme c’était lui le chef, je suppose qu’il avait ses raisons.
Quatre étages sans ascenseur, ce n’est pas rien j’en conviens et il me l’a bien fait comprendre en entrant dans mon appartement, s’épongeant le front et ouvrant d’office une fenêtre pour s’aérer. L’autre, toujours goguenard, le regardait imperturbable, s’intéressant à ma discothèque et prêt à entamer la discussion. Le vieux continuait sa litanie de récriminations, rembobinant son discours quand il arrivait au bout et le recommençant au passage où il ne trouvait pas mon adresse. Là encore, j’ai pris une mine compatissante mais sans chercher à argumenter, mon adresse était parfaitement libellé sur mon bon de commande, tous les livreurs ont des GPS et quatrième étage sans ascenseur notifié sur le document. De plus, un type aussi expérimenté que lui, vu son âge, et passant ses journées à livrer des matelas devait fatalement se trouver dans la même situation à chacune de ses courses et en baver à trimballer ses colis. Dur métier, d’accord, mais c’est son boulot !
J’imagine que le scénario est bien rôdé, le vieux gueule en permanence pour s’attirer la sympathie des clients qui par un réflexe compassionnel mettent la main au porte-monnaie. Devant la beauté de la prestation théâtrale, l’un qui rouspète et l’autre qui sourit pour équilibrer, j’ai filé une pièce aux artistes. Se faire livrer ses achats chez soi, par des comédiens de haut-vol comme ceux-là, méritait bien une petite participation…