Jules Renard en son inépuisable Journal : « La prose doir être un vers qui ne va pas à la ligne ».
Et cela de mordant, à propos d’un certain Fasquelle : «Il a un large nez au milieu du visage. C’est comme un coup de pied qu’on lui aurait donné, et dont il lui serait resté le pied ».
Et cela encore d’impératif : « Une phrase solide, comme construite avec des lettres d’enseigne en plomb découpé ».
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Chacun (et dans chacun il y a chacune et chacuns) trouvera, dans la boîte à outils de François Bon, de quoi démonter et remonter quantité de souvenirs, comme l'évocation d'une petite poule mécanique ne manquera de rappeler tel oiseau articulé battant des ailes ou tel pantin de bois polychrome plus ancien.
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AlbergoAlba, il 10 di agosto, a Locarno - Cattiva notte, dopo una serata alla terrazza della Contrada, in Piazza Grande, dove la cucina è sempre pessima. Dopo un giallo di qualità, La Condizione umana, ero rimasto sulla piazza dove ho visto mezz'ora di una merda americana intitolata Wrong Cops, nel gusto del neo-cinismo alla Tarantino. Avevo già visto Rubber, dello stesso Quentin Dupieux, sul modello del primo film del Spielberg, ma basta cosi.
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J'observe que l'esthétique de téléfilm tend, de plus en plus, à tout niveler dans le cinéma des temps qui courent.
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Contre tout ce qui procède des idées reçues, contre les principes non ressaisis par la réflexion individuelle nourrie de sa propre expérience, Karl Kraus agit par le langage lui-même, de l'intérieur. Ses aphorismes ne sont pas tous convaincants, loin s'en faut. Mais tout se passe, à leur lecture, comme plus tard à celle des Remarques d'un Wittgenstein: où ce qui compte n'est point tant la vérité de la chose dite que le mouvement libérateur de l'esprit visant à la conquérir.
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Il y a quelque temps, l'ami Sergio me demandait si je pouvais lui faire lire le premier papier de critique littéraire que j'ai composé, en 1969, sur Les courtisanes de Michel Bernard. Le voici donc recopié :
Sur Les Courtisanes, de Michel Bernard. Premier papier de la firme JLK, paru dans La Tribune de Lausanne
"Me diras-tu enfin qui elles sont,ces deux p... ?"
Mystérieuses, les courtisanes de Carpaccio ne laissent pas d'intriguer les esprits curieux qui s'avisent de percer leur secret. Trônant, encloses dans les galeries d'un palais vénitien, entourées d'animaux et de chiens, leur regard se perd en un au-delà de la toile que seul le rêve est à même d'évoquer.
C'est en ce rêve, précisément, que Michel Bernard nous entraîne dans son dernier roman, tentant de réinventer dans une fiction l'oeuvre du peintre, donnant à celui-ci vie et parole.
Mais c'est de Venise qu'il faudrait parler d'abord, de cette ville étrange qui s'envase lentement. De cette Venise de marbre, où l'on admire dans les musées les mille merveilles de l'art tandis que l'eau ronge et ruine ses soubassements. Ville abstraite s'il en est, apparente encore par le génie des hommes, mais promise à sombrer, ville ambiguë, amarrée à la terre ferme et qu'on imagine en lente dérive, elle est le lieu où le temps, depuis toujours, est suspendu, lieu du rêve par sa nature même, le caché étant pour le moins aussi important que le visible, bâtie à l'image du corps, faisant les hommes à son image.
« Demain je peindrai les courtisanes. » Ainsi commence le roman. Le peintre est embusqué à sa fenêtre, prisonnier entre le rectangle vierge de sa toile et le spectacle de la ville, déjà fervent à son oeuvre, ivre de se jeter sur ses pâtes et ses pinceaux mais conscient de son ignorance de la ville qui l'attend pour une longue exploration.
Qui est-il ? Il l'ignore. Pas plus ilne connaît ces créatures qu'il captive de son regard et dont il devrai peu à peu s'approcher, les traquant jusqu'en leurs appartements secrets et participant à leurs orgies quotidiennes, puis revenant dans la solitude de sa chambre close, enfin prêt à se livrer tout entier à sa toile.
Tout le moment se déroule entre lemoment de la décision et celui de l'acte. Dans un cheminement lent et sinueux,suivant le rythme de la ville, le peintre prépare sa rencontre avec les courtisanes et finalement est amené à elles par cette étrange naine, fascinant petit monstre intelligent qui le guidera dans sa démarche et le suivra jusqu'au seuil de sa chambre. Les courtisanes, elles, ne sont que "bestiales qui rotent", comédiennes cyniques et dupes de leur propre jeu. Elles sont objet, et Carpaccio les traitera comme telles. S'il fraie, c'est qu'une exigence le force à "vérifier la fidélité des arches", entre la tricherie et la perversion.
Roman de l'approche de l'oeuvre, Les Courtisanes est avant tout réflexion sur la création. À ce titre, il mérite déjà toute notre attention.
Créer est une aventure. Perpétuellement menacé par ses fantasmes, par les trompe-l'oeil que la réalité élève tout autour de lui, le créateur a pour devoir impérieux de se reconnaître, de se perdre dans l'oeuvre à la recherche de son double, du "fastueux insondable reflet". Son ultime conquête, plus que l'oeuvre elle-même, est l'acte de créer, l'abandon de soi dans la toile, dans la page blanche.
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Quelle fulgurance et quelle liberté, quelle poésie douce et dure à la fois, glaciale et brûlante que celle de Vallotton ! Vallotton est aussisuisse et fou qu’un Hodler, en plus ornemental parfois (même s’il y a aussi de l’ornement de circonstance chez Hodler) mais aussi débridé dans ses visions, et notamment dans ses crépuscules incendiaires et ses à-plats véhéments. Comme Hodler, en outre, Vallotton finit aux franges de l’abstraction lyrique à l'américaine, jeunes sauvages avant la lettre…
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L'idée m'est venue ce soir d'illustrer la couverture de L'échappée libre en reproduisant la magnifique toile de Robert Indermaur évoquant un homme volant, intitulée Hoher Himmel. Il me semble qu'on ne saurait trouver de meilleure illustration à l'envolée que je suggère au-dessus des formats...
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À La Désirade, ce vendredi 25 novembre. - Chaque nouvelle nouvelle d'Alice Munro m'apprend quelque chose et me souffle une idée de nouvelle nouvelle à écrire.
Ce matin, par exemple, en lisant Les Lunes de Jupiter, dernière nouvelle du recueil éponyme, il s'agit d'une femme écrivain qui accompagne son père cardiaque à l'hôpital, lequel décide de ne passe faire opérer et d'affronter la mort. Or cela me rappelle à la fois la fin dupère de Lucienne et les derniers temps de notre père, comme les observations de la narratrice à propos de ses deux filles me ramènent, évidemment, aux nôtres. Mais ce qui m'intéresse surtout, là-dedans, est que tout le vécu de l'écrivain est ressaisi par la fiction, comme je voudrais que le mien le fût tout pareillement. Enfin le grand thème d’Alice Munro pourrait se résumer dans cette formule : ce que la vie a fait de nous…
Annie Dillard : « Pourquoi lisons-nous, sinon dans l’espoir d’une beauté mise à nu, d’une vie plus dense et d’un coup de sonde dans son mystère le plus profond ».