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Les chemins de la tendresse de Simone Conduché;

Publié le 26 octobre 2014 par Pestoune

Prends ma main. Ne la lâche pas. J’écouterai ce que tu veux me dire. Si tu préfères te taire, j’entendrai ton silence. Si tu ris, je rirai avec toi, mais jamais de toi. Si tu es triste, j’essaierai de te consoler. Je ferai pour toi des bouquets de soleil. J’allumerai des feux de joie là où chacun ne voyait plus que cendres. Si je n’ai qu’une rose, je te la donnerai. Si je n’ai qu’un chardon, je le garderai pour moi. Je te donnerai ce qui te plaît, ce qui te rassure le plus, si je le possède. Si je ne le possède pas, j’essaierai de l’acquérir.

Donne-moi la main. Nous irons où tu voudras. Je te ferai entendre la musique que j’aime. Si tu ne l’aimes pas, j’écouterai la tienne. J’essaierai de l’aimer. Je te dirai le nom de mon fleuve, qui n’est pas le tien. Nul ne peut se flatter de posséder un fleuve, je le sais. Car l’eau fuit, coulant vers son destin, toujours pareille et toujours renouvelée. Chacun de nous a laissé, sur une berge, des instants de sa vie qui sont devenus des souvenirs, racines, source où l’on revient quand resurgit en nous la soif de pureté. […]

Je t’apprendrai ce que je sais. C’est peu. Tu m’apprendras ce que tu sais. C’est beaucoup. Ne dis pas que tu ne sais rien. Cela n’existe pas, quelqu’un qui ne sait rien. Ou alors, si ça existe, tant mieux. C’est comme un jardin sauvage, un jardin vierge, un jardin à naître, où l’on peut rêver de mille jardins. C’est comme l’enfant à venir – l’enfant espéré. C’est la vie devant soi, ronde et inattaquée, comme une boule de Noël.

Prends ma main

Prends ma main. Cinq doigts refermés autour des nôtres, c’est le plus beau cadeau du monde. Cela nous préserve de la peur, de l’abandon, du doute. Une main offerte, c’est un monde nouveau. Deux bras ouverts, c’est le miracle. Je te prêterai un peu de ma folie. Enseigne-moi un peu de ta sagesse. Un peu, mais pas trop. Quand tu me verras raisonnable, si je le deviens jamais, rends-moi, s’il te plaît, un peu de ma folie. Empêche-moi de m’éteindre. Je t’empêcherai de te brûler, pour rien, aux feux des pilleurs d’épaves. Efface de ma vie les gestes inutiles, les gestes sans amour. Il n’y a plus de gestes inutiles, quand ils servent à la joie. « Il était une fois » un lieu où j’aimais à chanter, quand j’étais petite, parce qu’un écho y chantait avec moi. Nous serons pareils à des échos. Je ne me blesserai pas de tes silences. Tu respecteras les miens. Je ne t’assassinerai pas de « Pourquoi ? ». Tu n’es ni clé, ni serrure. Je ne suis ni charade ni question à résoudre. Tu es toi. Je suis ce que je suis. Je ne troublerai pas ta musique intérieure. Ne dis pas que je fais des fausses notes si je ne pense pas comme toi. Nous sommes vivants, en quête de vivants. Donne-moi la main. Si tu veux me quitter au coin de la rue, je te quitterai au coin de la rue. C’est promis. Si tu veux aller plus loin, je t’accompagnerai jusqu’à ce « plus loin ». Mais pas au-delà. Tu n’es pas remorqueur. Je ne suis pas bouée. Nous allons avec la vie, comme le sable, le temps, et l’eau : entre source et delta.

(Simone Conduché; les chemins de la tendresse)

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