Magazine Journal intime

Contes pour Salilus – Shakespeare and Co (fin)

Publié le 30 octobre 2014 par Stella

Bibliothèque

(c) Momo-fait-de-la-photo

Jean-Baptiste se trouvait dans une petite pièce aux murs recouverts de livres. Il n’apercevait pas même un centimètre carré de mur libre. A terre, une lampe sourde diffusait un halo de lumière, propre davantage à la méditation qu’à la lecture. Il régnait un silence étrange : à peine percevait-il quelques voix à proximité, comme étouffées par l’épaisseur des étagères surchargées. Il regarda les titres autour de lui : c’étaient pêle-mêle des tranches de vie, des expériences, des carnets de voyages, des réflexions et des essais, autrement dit un peu de tout et de rien.

Il se sentait dans un état un peu étrange, cotonneux. L’odeur de vieux papiers, certainement, lui montait légèrement à la tête. Il avait l’impression que l’oxygène se raréfiait. Rien d’angoissant cependant, car l’atmosphère paisible et comme recueillie invitait à la quiétude et au repos. Il se sentait un peu las, la foule l’avait fatigué. Il aspirait à s’asseoir et justement, dans un coin de la pièce, un gros fauteuil club en cuir doux lui tendait les bras. Avec un sourire de contentement, il s’y installa confortablement et soupira d’aise.

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D’un geste à la fois machinal et adroit, le vendeur, qui arrivait on ne sait d’où avec son grand carton dans les bras, se pencha vers le fauteuil club et ramassa le volume posé sur l’assise et qui semblait y avoir été oublié par un lecteur insoucieux. Il le plaça au sommet de sa pile de livres et, pliant sous le fardeau, se dirigea à petits pas dans le dédale des salons de lecture vers l’entrée de la librairie. Une dame qu’il croisa l’interpella : « oh attendez, vous avez là un livre dont le titre me dit quelque chose, puis-je le prendre ? » « Je vous en prie, madame, voici… », répondit-il en lui tendant l’ouvrage. Elle lut le titre avec attention : Jean-Baptiste, une vie d’engagements. « Tiens, se dit-elle pour elle-même, comme c’est curieux… Je connais un Jean-Baptiste moi aussi et c’est un homme d’engagements, vis-à-vis de ses amis, de ses proches, de ses convictions. Ça fait longtemps que je n’ai pas de ses nouvelles, je devrais lire ce bouquin… ». Tournant la tête, elle avisa l’un de ces grands fauteuils club si propices à la lecture et s’y assis, prenant une profonde inspiration : « Voyons… »

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Le vendeur aux bras toujours chargés attrapa le livre abandonné sur l’un des fauteuils de la librairie. Le titre lui plût : Stella, celle qui aimait les étoiles de mer. Il lut l’exergue et sourit : Contre le règne des experts en tout genre, racontons un peu n’importe quoi. « Bon, commenta-t-il, il faudra quand même, un de ces jours, que je prenne le temps de m’installer moi aussi dans un des fauteuils pour lire un de ces fichus bouquins dont on ne sait d’où ils viennent… »


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