Magazine Journal intime

Avez-vous eurovisionné samedi soir ?

Publié le 26 mai 2008 par Anaïs Valente
Quand j’étais jeune et jolie, soit bien avant d’avoir atteint ma majorité, le samedi du Concours eurovision de la chanson était un samedi sacré.
Dès le matin, je m’organisais.  Je prenais une grande feuille, que je quadrillais savamment, suivant à la lettre mon programme TV.  J’y inscrivais lisiblement (à l’époque, mon écriture était encore lisible), les noms des pays, dans l’ordre de passage.
Puis j’attendais.  J’attendais.  Impatiemment.  Un peu comme une veille du passage de Saint-Nicolas, ou un soir de passage à l’an neuf.  J’attendais.
L’événement.
Je m’installais alors religieusement devant l’écran non plat du téléviseur, et, durant deux heures, je regardais cette émission culte.  Chanson après chanson, je notais les pays participants, sérieusement, à grands coups de ratures, avec des remarques afin de me souvenir de chacun.  Un vrai travail.
J’avais, exceptionnellement, le droit de tout regarder, malgré mon jeune âge, jusqu’aux votes, moment sacré de la soirée.  Germany, ten points,  Allemagne, dix points...  Je luttais contre le sommeil, je m’endormais, parfois, mais je n’aurais manqué ça pour rien au monde.  Et chaque année, c’était la même rengaine, les pays voisins se soutenaient, et je râlais.  Et la Gelbique perdait.
1986 fut bien sûr une année magique.  Réunis à plusieurs familles, nous avons espéré la victoire de Sandra Kim, nous avons apprécié sa chanson, et nous avons fait des bonds de joie lors du résultat.  Plus de vingt ans après, la tendance est à la moquerie, à propos des fringues, de l’allure, de la chanson de Sandra Kim... mais quel Belge n’a pas ressenti une toute chtite pointe de fierté à l’occasion de cette victoire tant attendue, et jamais réitérée depuis, d’ailleurs.  Vi, nous étions fiers.  Ce jour, là, j’étais encore jeune et jolie, et surtout naïve (ce que je suis toujours, je l’admets).  Un comparse m’avait fait croire à une conspiration voulant que les votes soient truqués et que la Belgique perde à un point près.  J’y ai cru jusqu’à bout, comptant, vote après vote, le score de mon pays, qui ne faisait que confirmer la théorie du complot.  Quelle griserie, quelle passion, quelle angoisse, et quelle joie démesurée lors de la victoire.
Depuis lors, ce concours s’est effondré comme un soufflé au fromage trop cuit.  Il a perdu sa saveur, son charme et l’engouement qu’il suscitait alors a semble-t-il disparu.  Les gagnants retombent dans l’anonymat aussi rapidement qu’ils en sont sortis.  Elle est loin l’époque des France Gall, Abba et Céline Dion, des « Si la vie est un cadeau », « Poupée de cire poupée de son » et « l’oiseau et l’enfant ».  De l’Irlande et ses nombreuses victoires.  Tout a changé.  Ou alors, c’est moi qui ai changé.
La dernière fois que j’ai regardé ce désormais long et soporifique concours (y’a maintenant tant de pays en Europe que s’ils participaient tous le concours durerait 48 heures ma bonne Dame), c’était l’année de Urban Trad et son magnifique Sanomi, qui finit deuxième si mes souvenirs sont bons.  Jusqu’à la dernière minute, j’ai cru à une victoire, et j’ai senti poindre à nouveau en moi cette excitation d’antan.  Et si nous gagnions à nouveau ?  Et puis non.
Depuis, j’ai plus jamais zieuté.  Et hier non plus.
Car hier, j’avais une sortie prévue de longue date.   Puis annulation de dernière minute.  Diantre.  Sacrebleu.  Toute seule devant ma TV un samedi soir, condamnée à regarder l’Eurovision.  De quoi me jeter ensuite à la Meuse.  J’ai dès lors fait quelques fouilles sur le net, et, miracle, je me suis offert une soirée séries-TV, avec quatre épisodes des Desperate Housewives suivis de trois épisodes de Grey’s Anatomy.  De la dernière saison.  D’après les grèves des scénaristes.  Un régal.  J’ai les yeux en forme de soucoupes volantes depuis lors (six heures ininterrompues de séries, ça laisse des traces), mais no regret.  Et no Eurovision.
Allez, je ne résiste pas à l’envie de vous proposer un petit florilège de gagnants, en deux parties, c’est long mais c’est bon, et ça vaut le détour, car y’a du lourd, du très lourd, du ringard, des tenues à mourir de rire, des chorégraphies à se rouler par terre.  C’était ça l’Eurovision dans le temps, ma bonne Dame.   Je bénis Dailymotion, passque je l’avoue, j’ai adoré revoir ça (en plus y’en a plein que j’avais oubliés, dingue).  

All Winners of Eurovision Song Contest 1956-2007
envoyé par algizdk
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envoyé par algizdk

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