8 décembre 1914

Publié le 02 décembre 2014 par Christinedb

8  décembre 1914

Ma chère et bonne Cécile,

Je n’ai pas pu t’écrire hier ma chérie et je n’ai pas beaucoup de temps pour le faire aujourd’hui.

Nous avons eu la pluie de comme en Auvergne ça mouille et quand on est mouillé on est morose. Heureusement le soleil finit toujours par se montrer. Le soleil ! Le soleil c’est le bonheur. Tiens, le soleil, sais tu à quoi je le compare, à tes lettres lorsque une vague de mélancolie me menace.   Le soleil c’est le bonheur ! La pluie et le reste c’est… c’est pour la patrie. Alors sourions. Nous avons eu du boulot ces jours derniers mais tu le vois j’en sors gai et content comme dit la chanson, mais je ne dirais pas ce qui s’est passé car avec ton tempérament à voir tout en moins beau, je craindrais de te mettre martel en tête.

Qu’il te suffise donc de savoir que je suis content de moi et que d'autres le sont aussi de moi.

Cela et tes bonnes lettres et… le soleil, c’est la vie d’un soldat et je ne croyais pas l’être  autant.

J'ai bien reçu ma chérie, je te l'ai dit tes lettres jusqu'au 26 et celle de Loulou, j'ai reçu ma paire de manchettes qui seront les n°1, celles que j’ai acheté à Dunkerque en ayant déjà vu de vertes. J’ai reçu mes genouillères, des genouillères ! Mais me vois-tu avec cela ? Eh bien oui, je les mettrais oui je les mettrais pour marcher… à quatre pattes dans les tranchées et je les garderai. Je les garderai jusqu’à Nancy où j’arriverai gâté, gâté par toute tes tendresses.

J’ai reçu aussi ma photo de Robert et une de bien. Le pauvre gros,  je néglige, je le rembourserai de son attente avec une prochaine grande lettre.

Tout va bien, pas vite, on piétine, c’est l’ordre.

Je t’envoie le reçu du mandat de 300 Fr.

Je t’embrasse ma chérie, je tremble un peu car j’écris à l’ombre, je cours au soleil.

Je pense souvent à toi, mais tu m’as envoyé un moyen pour y penser davantage encore. Ton passe-montagne (je ne dirai plus lâche… etc ) m’a beaucoup servi ces jours-ci. La laine en est douce, la mentonnière parfois me caresse les lèvres la nuit. C’est donc, je crois que ce sont les tiennes et malgré la rafale de coups de fusil ou de canon qui gronde à côté je me rendors avec ton souvenir.  Je t’embrasse donc moins ici, ma chérie parce que j’ai des décomptes à présent. Ton tout à toi

J.Druesne

On vient de me faire cadeau d’un manteau gris en toile à voile très pratique, cela supprime donc ma pèlerine,  mais avec le sac en caoutchouc de Gustave cela me fait une charge que je suis heureux d’employer parfois mais qui en marche me pèse sur les épaules. Ça marche quand même !!

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8 décembre 1914 (JMO du 37e RI)

Sans changement. Des relèves furent faites dans les bataillons de 1ere ligne pour faire alterner les compagnies.

Cartographie du 8 décembre 1914