Magazine Journal intime

L’attente de Cécile

Publié le 23 décembre 2014 par Christinedb

Cécile a dû longtemps espérer,  d'un espoir bien faible... Puisque les courriers reçus entretenaient cette minuscule lueur.

Message du Colonel Lauzun

37e Régiment d’Infanterie - Le Colonel

Le 16/01/1914

Madame,

Permettez moi Madame, de m’incliner devant votre immense douleur et les inquiétudes qui déchirent votre cœur. Je ne puis ni l’apaiser, ni satisfaire votre demande car nous ne savons pas ce qu’est devenu votre mari et nous ne pourrons jamais le savoir. Est–il tué ? blessé et prisonnier ? A toutes ces questions je ne puis répondre nettement.

Il a disparu avec toute sa compagnie. Les blessés ont étés recueillis par les allemands, les morts ont étés ensevelis par eux, sur un terrain dont ils sont les maitres absolus et sur lequel nous ne pouvons aller. Nous n’apercevons plus au loin, sur les tranchées ennemies que quelques capotes bleues….

Il faut donc conserver un espoir bien faible mais que nous gardons tous, de voir votre mari vous donner un jour signe de vie.

En tous cas, quoiqu’il arrive plus tard, sachez une chose, c’est qu’il est tombé en brave et que sa mort fait l’admiration de tous. Sachant le danger, il a conduit sa compagnie avec un courage, un calme et une énergie admirables. J’ai rendu un dernier hommage à sa valeur en le faisant citer le 28 décembre à l’ordre de L’armée dans les termes suivants :

« A fait preuve d’un courage admirable en maintenant sa compagnie sous un feu de mitrailleuses, restant seul debout au milieu de ses hommes couchés. A été blessé grièvement »

Votre mari a été blessé étant lieutenant. Il serait certainement promu capitaine s’il était revenu de ce terrible combat. Malheureusement il est tombé. Vous avez droit à la moitié de sa solde de Lieutenant. Il serait prématuré de faire d’autres demandes basées sur sa mort probable. J’ai vu revenir tant de gens que l’on considérait comme morts et qui n’étaient que blessés et prisonniers de guerre.

J’ai apprécié votre mari pendant qu’il était avec nous pour son beau courage et l’élévation de ses idées. Je regrette en lui, un chef qui savait s’imposer par son esprit du devoir et son autorité. Sa conduite dans cette guerre terrible sera pour ses enfants un glorieux patrimoine dont ils pourront être fiers. Je les salue avec vous Madame, comme la digne épouse, les dignes enfants d’un héros.

Veuillez agréer l’hommage de mon respect et mes vœux pour un avenir moins désolé que le présent.

Lauzun


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