Sur une première lecture de Soumission, à préciser plus tard en détail...
À La Désirade, ce 16 janvier. – J’ai achevé, tôt ce matin, la lecture de Soumission de Michel Houellebecq, sur une impression meilleure qu’à mi-parcours et cependant mitigée, comme si ce livre restait d’une importance bien secondaire,voire anodine par rapport (notamment) aux événements récents.
Le talent pince-sans rire de l’auteur y est sans doute, et en crescendo après une première partie assez ennuyeuse, mais l’enjeu de cette fable conjecturale reste limité et, en somme, terriblement littéraire dans son développement, coupé de la réalité et d’autant plus que celle-ci postule un avenir relevant plus de la fantasmagorie que de l’extrapolation crédible, voire éclairante.
Comme il s’agit d’une fable, on ne demandera pas à la chose d’être sociologiquement plausible, ainsi que l’était l’uchronie de Philip Roth, dans Le complot contre l’Amérique, mais le gros défaut du livre est tout de même qu’on ne sent absolument pas, dans une France qui reste celle de Coppé et de Vals, ou de Bayrou que le protagoniste conchie plus qu’aucun autre, ce qu’on pourrait dire l’épaisseur de l’Histoire.
Sans entrailles physiques, résigné à n’être plus qu’un has been intellectuel, juste frémissant du bout du zob (et encore, si peu...) et confinant ses autres raisons de ne pas se suicider entre fumée intensive et gastro bas de gamme, le protagoniste François (à ne pas confondre avec le formidable nouveau pontife catho) cite Huysmans, Léon Bloy (dont il ne dit que des sottises), Nietzsche (qu’il qualifie de « vieille pétasse »), l’excellent Chesterton (pour sa doctrine économique) ou René Guénon (le contempteur de la décadence occidentale rallié à l’islam) mais comme en effleurant chaque thème, ramenant tout finalement à une sorte d’éloge de l’islam soft couvant les élites intellectuelles mâles (François aura sa chaire surpayée dans la Sorbonne saoudite et trois mousmées au moins) et ramenant les femmes à leur juste place, en cuisine ou à la nursery.
Et pour dire quoi tout ça ? Qu’en 2022 la France mahométane se portera mieux qu’en se disant massivement CHARLIE, aujourd’hui, pour ne pas voir la réalité réelle ?
J’ai beau me dire que « tout ça » relève du deuxième degré et de la rêverie conjecturale, et qu’on ne saurait identifier l’écrivain à son pleutre cynique sanglotant sur lui-même et enjambant les cadavres (une serveuse de station-service flinguée, deux Maghrébins également massacrés, sa mère qualifiée de "putain" ou son père juste bon à lui fourguer son héritage) sans la moindre compassion, tout de même je trouve ça bien équivoque et superficiel...