Humour (en) thaï

Publié le 27 mai 2008 par Anned

C'est l'histoire d'un petit garçon français de quatre ans, né en Thaïlande et parlant couramment les deux langues. C'est un beau petit " farang " selon les critères de beauté siamois : blond aux yeux verts. Alors les Thaïs en sont fous, surtout quand à la fierté de sa nounou thaïe il se met à articuler parfaitement quelques mots dans leur langue en plein marché du village.

Comme souvent le dimanche, avec ses parents et ses frères et sœurs plus âgés, il déjeune dans un de ces restaurants de plage si communs en bordure du golfe de Siam : les pieds dans le sable, sur des tables en bambous disposées à l'ombre des filaos.

Parmi les déjeuneurs, figurent à une table voisine de celle de la famille un groupe de jeunes imbéciles du coin bien décidés à profiter de la journée pour se saouler méthodiquement. Le processus est largement avancé comme en témoigne le nombre conséquent de bouteilles de bière vides méticuleusement entreposées par la serveuse sous la tablette de service voisine de leur table : elle veut pouvoir s'y retrouver dans ses comptes !

Le petit farang, debout sur sa chaise, ne peut s'empêcher de lorgner vers la tablée bruyante d'où on ne résiste pas au plaisir de l'asticoter. Un plaisir tout asiatique... " Hey, you ! What's your name ? You beautiful..."

En quatre ans de vie parmi les Thaïs le petit bonhomme a appris une chose ou deux sur l'attrait qu'exerce sa peau blanche sur ces descendants de paysans qui évitent le soleil comme la peste pour ne pas accentuer davantage leur hâle naturel. Dans une foule thaïe, il sait se tenir dans les jambes d'un adulte protecteur notamment pour qu'on ne lui pince pas la joue à tout bout de champ en signe d'admiration ( ?!?).

Il ne s'étonne donc pas outre mesure d'être l'objet de l'attention de la bande, mais ça l'énerve quand même. Il s'en plaint à sa maman, qui répond :

" Tu parles leur langue, moi pas. Alors dis leur gentiment d'arrêter...

Il se tourne vers eux et marmonne quelque chose dans ces dents, qu'il répète plusieurs fois.

La " grande " sœur de six ans - qui elle aussi maîtrise parfaitement la langue siamoise - avertit la tablée :

Les adultes effarés comprennent que le cher ange dit en substance " tu pues du c... " à l'adresse des importuns.

De son côté la bande de jeunes thaïs n'a pas compris : un farang, même tout petit, ça parle anglais, pas thaï. Ils ont beau n'avoir qu'un anglais limité, ils se rendent bien compte que ces mots anglais-là sonnent bizarrement. Bref, comme ils ont peur de comprendre, ils préfèrent ne pas comprendre. Ca ne les empêche pas de poursuivre leur harcèlement : " Hey, you ! What's your name ? You beautiful... "

D'un seul coup le petit bonhomme a un coup de sang. Il se dresse sur sa chaise et claironne l'insulte à haute et intelligible voix de telle sorte que non seulement la bande de jeunes c..s l'entend parfaitement, mais aussi toute l'assistance du restaurant.

Le sang du papa ne fait qu'un tour : le gosse prend une claque. Maintenant, il braille en se tenant la joue et il boude, tout rouge. Les juvéniles crétins qui ont perdu la face - notion puissante difficile à appréhender pour des occidentaux - se retournent enfin pour de bon et piquent du nez dans leurs verres de bière et leurs bols de soupe tom yam.

Après un court silence, le reste de l'assistance reprend repas et conversation comme si de rien était : il est de bon ton de ne pas en rajouter et d'éviter d'humilier davantage ces freluquets. Ni le gamin, d'ailleurs.

Pas toute l'assistance cependant : juste à côté du garçon qui boude de plus belle, une mamie thaïe occupée à donner la béquée à un bébé dans une poussette, rit aux éclats. Elle voudrait se reprendre, on la voit se mordre les lèvres, mais elle ne parvient pas à contenir son fou-rire. Et elle rit, elle rit à en pleurer.