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Le cinoche à Jules-The Warriors

Publié le 20 janvier 2015 par Jules

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Ceux de ma génération se souviennent avec émotion de « la 5 », la défunte chaine de Berlusconi. Pas pour ses programmes maison, ça non, ni pour Guillaume Durand, mais bien pour ses films diffusés tard le soir. En effet à l'époque si on n'était pas l’heureux possesseur d’un décodeur Canal Plus le seul moyen de voir certains films de genre (SF, Horreur Fantastique), c’était la 5. Un jour, en programmant le magnétoscope familial et en ayant prévu largement de quoi regarder la fin de « L’empire Contre Attaque », j’ai enregistré par mégarde le début d’un autre Film, « Les Guerriers de la Nuits » (The Warriors en VO).

Certains films ont la faculté de vous happer des les premières images et de ne plus vous lâcher ensuite. C’est le cas avec « The Warriors ». Très rapidement et en quelques plans portés par une musique diabolique nous voilà plongé dans un New York cauchemardesque. Cyrius, un leader charismatique a convié la plupart des gangs du coin à un meeting secret au cœur de Manhattan. Sa grande idée, rallier tout les gangs de New York pour n’en former plus qu’un et ainsi contrôler la ville. Mais il se fait abattre en plein discours. Dans la panique une rumeur se propage, ce serait le gang des Warriors qui aurait commandité l’assassinat. Ces derniers, bien qu’innocents, se retrouvent malgré eux pris au piège d’une machination infernale, obligés de traverser New York afin de rejoindre leur territoire (Coney Island) et en évitant si possible de se faire trucider en chemin par tout les gangs de la ville.

« The Warriors » est réalisé à la fin des années 70 par Walter Hill. Hill est un solide artisan qui a tâté d’a peu près tout les corps de métiers. Assistant de Norman Jewison sur « l’Affaire Thomas Crown », scénariste chez Sam Peckinpah, producteur de la saga « Alien » etc. mais c’est surtout en tant que metteur en scène qu’il se distingue. Cinéaste que l’on pourrait qualifier « à l’ancienne » et amateur d’un cinéma bien « burné » ses films sont, comme chez John Carpenter, toujours des Westerns déguisés. D’ailleurs on pense beaucoup à « Escape From New York » en regardant « The Warriors ». Réalisé en 1979, « Les Guerriers de La nuit » est un parfait film de genre. Sa force réside dans le coté ludique de sa mise en scène. En effet chaque station de métro parcourus (niveau) révèle un nouveau gang à affronter. Chaque gang est facilement identifiable visuellement (vêtements, type d’armes …) certains sont même totalement farfelue (les joueurs de baseball peinturlurés). Cette approche graphique aura une influence notable sur de nombreux médium, la bande dessinée (Akira) et le jeu vidéo (le film invente au passage le concept de Beat them All). De plus Walter Hill, en bon artisan qu’il est, sait parfaitement faire monter la pression chez le spectateur jusqu'à faire exploser la violence à l’écran, les bagarres sont à ce titre très brutalement mises en scènes (utilisation judicieusement du ralentit à la manière d’un Peckinpah).

Le film est également une réflexion sociale extrêmement noire. En effet le personnage de Swann et sa bande affrontent mille dangers mais pour quoi au juste ? Retrouver leur vie misérable et sans avenir ? A la hiérarchie des gangs se substitue la hiérarchie des classes comme le montre très explicitement la scène du métro avec les jeunes couples fortunés. « The Warriors » devient alors une œuvre tribale et nihiliste. A l’origine la version longue du film prévoyait en guise d’introduction des planches de BD comparant les Warriors à des spartiates de l’antiquité. Cela pour mieux signifier leur besoin (en invoquant un mode de vie ancestrale) de se substituer à une société qui les rejette. Trop explicites, ces cartons ont judicieusement été enlevés par les producteurs de l’époque, le film n’en est que plus efficace.

« The Warriors » est devenu avec le temps l’objet d’un véritable culte, une version disco d'Orange Mécanique et à l'instar du film de Kubrick, on retrouve son influence un peu partout. En 2001, Martin Scorsese, grand amateur du film, le citera explicitement pour son « Gangs Of New Yorks ».


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