Le ciel passait sans s’arrêter sur les maisons de lèpre au cœur du grouillement. Le frottement des sangs électrisait l’étroite rue où se débraillaient les étals. De fruits et d’épices, d’étoffes et de chair vive, la fièvre d’être allait son grand train polyglotte dans le fatras du soleil.
Un petit blanc voyeur de tumulte sirotait son rosé en bord de terrasse. « Vital foutoir, griffonnait-il au dos d’une grille perdante. Toutes les sèves à fleur de peau, et la sueur de jouir vite : d’autres attendent. Grandeur du ventre sans Dieu, misère de Pascal sans lecteurs », et plusieurs pensées de cette veine. Mais un Indien sans plumes vient lui demander le bic pour cocher des rapidos. Le petit blanc désoeuvré s’allume une blonde. Deux Japonais le numérisent au vol : il ne se croyait pas si rare, si français sans béret. Sur le trottoir d’en face la boulangère plus voilée que sœur Sourire tend un bâtard à un black à roulettes. Une belle de jour tient le porche en chaloupant ses deux lolos plus lourds que des pastèques. Même les pigeons bouillonnent. Ca pète le feu de partout.
Le petit blanc retrouve le bic et le fil de ses phrases : « Cher Blaise, j’ai bien peur que tu n’aies fait le mauvais pari. Aucune trace ici du silence éternel ni du roseau pensant. Tout ce quartier suinte le divertissement, s’en porte bien et te retourne ton diagnostic : Misère de Dieu sans l’homme ! »
Arion